La poursuite par les Archives
départementales de la Vendée de la numérisation des anciennes déclarations de
succession, maintenant jusqu’à la fin du 19
e siècle, et leur mise en
ligne sur son site internet, nous apportent des informations précieuses sur la
fortune foncière des châtelains de Linières dans cette période. Cette fortune
est née dans le bocage avec l’achat du domaine de Linières à Chauché en 1800
par Joseph Guyet, à sa future épouse. Elle est née aussi dans le marais
poitevin avec l’héritage en 1807 de la mère de Joseph Guyet à Champagné les
Marais et Puyravault, Catherine Couzin.
Avec, en plus, l’investigation des archives
notariales de Paris aux Archives nationales, nous pouvons mieux comprendre
comment ce patrimoine a évolué.
Les propriétés dans le marais
À Champagné, Joseph Guyet hérita
de l’important domaine de la Loge du Chail et à Puyravault de la cabane de la
Grande Balise. Il racheta probablement les parts des autres héritiers pour
devenir l’unique possesseur des 252 hectares de ces deux cabanes, comme on
appelle les domaines dans le marais poitevin. En 1814, il acheta le château de
Champagné, situé dans le bourg de la commune, avec ses dépendances, à Marie Louise Julienne Gazeau de la Brandasnière,
dernière dame de Champagné. Il laissa ainsi à son fils, et unique
héritier, une surface de 466 hectares dans les marais. Le fils,
Guyet-Desfontaines, fit l’acquisition de 19 hectares, laissant à son épouse qui
lui survécut la propriété de 485 hectares. Le 3 mai 1865, celle-ci, Antigone Emma Pineu-Duval, vendit le château de
Champagné à la famille Auger (1). Son petit-fils, Marcel de Brayer,
hérita du reste, soit 482 hectares. À la mort de ce dernier en 1875 nous ne connaissons pas la
composition de ces domaines dans le marais. Les archives conservées du bureau
des déclarations de succession de Chaillé-les-Marais ont un vide pour la
période concernée par sa déclaration de succession, du 12 juin 1875 au 26
juillet 1876. Heureusement, il n’en est pas de même pour les autres
déclarations faites dans le bocage.
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Sèvre Niortaise débouchant dans la mer |
Pendant la période 1830/1868, il
ne semble pas qu’on ait desséché des marais dans les deux communes de Champagné
et Puyravault. Cela s’est fait au temps de Marcel de Brayer dans les années
1870. Avec vingt autres propriétaires, celui-ci adhéra en effet à la « Société
des lais de mer de Champagné et Puyravault », constituée pour des travaux
de dessèchement des marais et lais de mer sur ces deux communes (2)
bordant la baie de l’Aiguillon.
Les
lais de mer sont
les
terres nouvelles
formées
par dépôts d’alluvions sur le rivage.
Guyet-Desfontaines procéda à un
découpage de ses propriétés sur Champagné, et à sa mort elles constituaient 22
locations différentes de prés et carrés des marais, y compris un petit marais
salant. Son épouse fit quelques regroupements, aboutissant à 16 locations
différentes, dont 12 étaient les mêmes qu’au temps de son mari.
Ce qui frappe dans les valeurs de
revenus déclarées au moment des successions, c’est le rendement financier bien
meilleur dans le marais que dans le bocage. Nous avons fait les calculs
comparatifs au décès de Guyet-Desfontaines en 1857, entre ses 930 hectares
qu’il possédait dans le bocage et ses 485 hectares dans le marais. Les revenus annuels
à l’hectare dans le marais (1146 F) s’élevaient au double de ceux trouvés dans
le bocage (549 F). Cet exemple est probablement représentatif. L’élevage, dont
les prix ont augmenté plus vite dans la première moitié du 19
e
siècle que ceux des céréales, était pratiqué de manière bien plus importante
dans le marais, ce qui explique sans doute cet écart. La fertilité des terres
était aussi bien meilleure, et nous avons pu constater que les frais
d’entretien des canaux ne représentaient pas alors une charge importante.
Le domaine de Linières et ses métairies
Dans le bocage, Joseph Guyet
avait acheté Linières et ses 14 métairies à sa future épouse en 1800. S’il apparaît très probable que
les métairies de la Mauvelonnière, Vrignais et Guérinière, et les deux métairies
de Linières, sont nées sur le territoire du fief appelé Drollinière (devenu
Linières) à l’origine, les autres métairies ont sans doute fait l’objet d’achat
ou d’héritages au fil des siècles. C’est le cas de la Fontaine à Saint-Fulgent,
qui appartenait en 1729 à Charles Royrand, seigneur de la Roussière, et qui l’a
cédée ensuite à Marie Agnès Badereau, épouse du seigneur de Linières, Louis
Venant Cicoteau (3). Mouvante alors de la seigneurie du Puy-Greffier, elle contenait
«
terre à 4 bœufs » dans le
texte de l’aveu de Saint-Fulgent de 1774, et 40 hectares en 1830. C’était le
cas aussi de la métairie de la Chevantonnière (devenue Chantonnière) contenant
aussi «
terre à 4 bœufs » (47 hectares en 1830). Marie Agnès Badereau
l’avait eue en héritage de son père Jude Badereau, mouvante elle aussi de la
seigneurie du Puy-Greffier (4). Son père, qui avait été
auditeur à la chambre des comptes de Bretagne, lui avait aussi
légué d’autres terres sur cette paroisse, notamment dans le fief Peron, mouvant
du fief Rollin ou Drolin, lequel avait été réuni à la seigneurie de Saint-Fulgent (5). Et nous avons pu repérer aussi
que la métairie de la Gagnollière aux Essarts faisait partie du patrimoine de Louis
Cicoteau, l’acheteur de Linières au début du 18
e siècle (6).
Alexis de Lespinay avait acheté le 29 mai 1773 la
borderie de la Vallée (les Essarts) en partie par amortissement d’une rente de
son propriétaire créée en 1699 au profit de Cicoteau, aïeul de sa femme (7). La
métairie de la Touche provenait des Cicoteau, puisqu’on a une branche de cette
famille qu’on a appelé les Touche-Cicoteau (8).
Mme de Lespinay, remariée à Joseph Guyet, avait racheté le domaine en 1796, devenu bien national en 1793 suite à
l’émigration de son ex-mari Charles de Lespinay. Ce chiffre de 14 comprend des
métairies regroupées comme aux Essarts ou à Linières même, où il y avait deux
métairies, l’une dite de « Gauche » et l’autre dite de
« Droite ». La première,
appelée aussi « métairie du château », sera celle de la famille Breteau au 20
e
siècle, et la deuxième,
appelée aussi « métairie de Linières », deviendra la Louisière au début du 20
e siècle. Ce
repère directionnel de désignation des deux métairies se justifie en regardant
dans la direction du nord.
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Ancienne châtellenie de la Godelinière |
Joseph Guyet vendit la métairie
des Bouligneaux (Saint-Martin-des-Noyers), qui avait été achetée en 1791 par
Charles de Lespinay. Il acheta le petit domaine de la Godelinière comprenant un
château, une métairie et une borderie aux Landes-Genusson (9). Celui-ci avait
été confisqué à Édouard Mesnard de la Barotière, guillotiné à Paris pendant la
Révolution. Cet achat du 21 avril 1798, par adjudication à la bougie, s’est
réalisé pour la somme très importante de 247 300 F. Rappelons-nous que le
domaine de Linières et ses 14 métairies avait été acheté deux ans plus tôt pour
185 560 F. Les revenus annuels de la Godelinière, déclarés par l’expert
désigné pour fixer le prix de la première enchère à 10 710 F, s’élevaient
à 714 F. Dans un bail de 1821, le fermage était de 2 000 F. Multiplié par
vingt, comme on faisait à l’époque pour évaluer le montant théorique du
capital, cela donnait une valeur de 40 000 F. Mais on était en 1798, dans
une époque de méga inflation des prix, et la monnaie en circulation ne valait
plus rien. On venait de retirer les assignats pour les remplacer par des
mandats territoriaux qui sombrèrent eux-aussi. En juillet 1797, on était revenu
à la monnaie métallique. Suivant la loi, la moitié du prix de la vente devait
être acquittée dans le mois suivant l’achat. De plus, un cinquième du prix
était payé comptant en numéraire et un autre cinquième payé en monnaie papier
dans les six mois. Enfin 40 % du prix pouvait être payé par quart annuel dans
les quatre années suivant la vente, mais avec un intérêt des sommes restant à
payer de 5 %. Il serait intéressant de connaître, si c’est possible, comment
l’acheteur ne s’est pas ruiné en s’engageant sur une telle somme. Puisqu’il
semble bien avoir fait de bonnes affaires et s’être enrichi. Il avait vrai qu’une
telle inflation enrichissait les emprunteurs.
Joseph Guyet acheta aussi le
moulin de la Clochette à Saint-Fulgent, revendu par son fils, et le bois de
l’Angebaudière à Bazoges-en-Paillers (12 ha). Il possédait aussi à Aigrefeuille
en Loire-Inférieure, environ une trentaine d’hectares dans la borderie des Loges, acquise
comme bien national par Félicité Duvigier, devenue son épouse. Celle-ci avait concédé un bail de 5 ans avec le fermier occupant
les lieux, Julien Hervouet, le 25 décembre 1797. Ce dernier avait effectué des
réparations, et pour le rembourser il fut exonéré du paiement de la ferme pendant les 5 années. Les séquelles de la guerre étant probablement à l’origine
des réparations à effectuer (10).
Au total en 1857,
le fils de Joseph Guyet, Marcellin Guyet-Desfontaines possédait dans le bocage 17 métairies
rattachées au domaine de Linières, plus le domaine de la Godelinière et les Loges. C’était de grandes métairies
d’une cinquantaine d’hectares en moyenne. Il y en avait une à Saint-André-Goule-d’Oie : les Noues (52 ha). Quatre autres étaient situées à la fois sur St
André et sur Chauché : deux à Linières (totalisant 90 ha), la métairie du
bourg de Saint-André (31 ha) et la Morelière (53 ha). Aux Essarts on trouvait les
métairies de la Gagnolière (51 ha), la Nouette (46 ha), la Touche du bas (41
ha) et Bellevue (41 ha). Les deux dernières seront vendues par madame
Guyet-Desfontaines après 1857 au baron des Essarts (11). À Chauché il y avait la métairie du Vrignais (54
ha, dont 5 ha situés sur la commune des Essarts), celle de la Mauvelonnière (49
ha) et celle de la Guérinière (65 ha). Enfin à Saint-Fulgent on trouvait cinq
métairies : la Morinière (52 ha), la Fontaine (40 ha), la Chantonnière (47 ha), la Roche au Roi (61
ha) et la Grande Roussière (61 ha). Ces surfaces sont restées identiques entre
1830 et 1875.
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Château de Linières (1875-1912) |
Avec l’instauration du premier
cadastre foncier en 1838, dit « napoléonien », on trouve dans les
déclarations de successions de Guyet-Desfontaines en 1857, l’indication de
chacune des parcelles. Ainsi à Saint-Fulgent les cinq métairies sont décrites en
292 parcelles cadastrales avec leurs noms, numéros, surfaces et revenu
cadastral. Il en est de même pour le château de Linières. Cela permet de
préciser quelques points de géographie des lieux, comme les bois, les landes,
les bâtiments, les points d’eau etc. Ces détails ne sont donnés que pour le
bureau de Montaigu à cette date. Mais ils ne permettent pas de se rendre compte
néanmoins de la fin des terres en landes, pour la pratique des jachères, faute
d’une indication suffisamment fiable, systématique et comparative entre deux
dates.
Mais on apprend qu’autour du
nouveau château construit à Linières en 1871/1873, on a réuni 17 hectares de
terres, dont une grande part soustraite aux deux métairies pour les destiner
aux nouveaux jardins, parcs, étang, etc.
En 1875, il restait encore de
vieux bâtiments à Linières, est-il indiqué dans la déclaration de succession de
Marcel de Brayer. Cela confirme d’autres informations. C’est après cette date,
et sur l’initiative d’Amaury-Duval, que seront construits, à la place de ces
anciens bâtiments, la conciergerie près du château, achetée en 1912 par Louis
François. Et dans le même temps seront construits aussi les bâtiments de la
métairie dite de « Gauche » qui deviendra propriété des Breteau au 20
e
siècle. Les bâtiments de la Louisière (anciennement métairie dite de
« Droite ») seront construits au tout début du 20
e siècle.
Et en attendant, les bâtiments d’habitations du métayer
et d’exploitations se trouvaient toujours à Linières. Ils ne furent démolis par
L. de la Boutetière, qu’après la construction de la Louisière.
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Étang de Linières |
Quant au nouvel étang, nous
apprenons qu’il était déjà creusé en 1875. Il a dû l’être en même temps que
l’on construisait le château entre 1871 et 1873. Nous savons maintenant qu’il a
été creusé à l’endroit d’un ancien étang, abandonné au 18
e siècle
aux broussailles, où ne devait plus couler que le ruisseau de la Fontaine de la
Haute Gandouinière. L’existence de cet ancien étang est attestée dans des
documents du 17
e siècle (12), ainsi qu’au moins un moulin à vent sur
la colline du côté est, dans le champ appelé depuis « le champ du
moulin », faisant partie de la métairie du bourg de Saint-André au début du
19
e siècle.
Le bois du Vrignais (ou Vergnais), dont l’existence est attestée à
la fin du 18e siècle par la carte Cassini, existait toujours au
moment du rachat de Linières au département en 1796. Dans l’acte de rachat par Mme de Lespinay on relève une superficie
de 20 boisselées, et il faut y ajouter 65 boisselées de bois de hautes futaies des Grandes Vergnais. Il semble que ces indications
soient incomplètes néanmoins. Joseph Guyet a entrepris de le défricher en
partie en 1830 (13). En 1875 il en restait au moins encore 4
hectares. Et on indique aussi l’existence d’un bois taillis sur la métairie
Droite (Louisière), qui semble logiquement ne faire qu’un avec le bois du Vrignais
sur la carte Cassini.
Le taillis de la Bergère, proche
du château, totalisait 20 hectares en 1796 et il est à nouveau cité dans la
déclaration de succession de 1875, mais réduit à 4 hectares 80 ares. Une autre
parcelle, appelée le Bois de Linières, était en futaie avec seulement 38 ares
en 1875. Il
était situé au sud-ouest du château, près d’une fosse, appelée la Fosse Noue en
1675 (14).
Le bois de haute futaie du Coudray (25 boisselées) et le bois de haute
futaie de la Hutte (20 boisselées), cités dans l’acte de 1796, ne paraissent
pas en 1875. On peut valablement en déduire qu’ils ont été défrichés entre ces
deux dates.
Un détail intéressant nous est indiqué dans la déclaration de
succession de Joseph Guyet en 1830 au bureau de Luçon. En reportant les
surfaces des domaines en hectares, ares et centiares, le receveur a rappelé
leur équivalent dans l’ancienne mesure en journaux utilisée dans le marais. On
sait ainsi qu’un journal y valait 0,342 hectare. Il faut rattacher cette équivalence au territoire de l’ancienne
seigneurie de Champagné.
Les déclarations de succession
en 1830, 1857, 1868 et 1875
Les déclarations
de successions des propriétaires de Linières ont été faites par mandats donnés
aux membres vendéens de la famille.
Dans le marais,
c’est le notaire de Chaillé-les-Marais, Hilaire Martineau (1794-1866), qui
déclare la succession de Joseph Guyet en 1830 au bureau de Luçon. Il était son
neveu par alliance, marié à Rose Guyet, la fille de son frère Jacques Charles
Guyet. Cette nièce eut pour frères le capitaine de vaisseau Charles Jean
Baptiste Guyet (Voir
le dictionnaire des
Vendéens sur le site internet des Archives de Vendée :
Charles Jean Baptiste Guyet), l’avocat parisien
Eugène Guyet, Armand Germain Guyet, notaire à Marans.
|
Charles Jean Baptiste Guyet Eugène Guyet
J.
A. Barre (1811-1896) : caricatures des personnes
qui fréquentaient le salon de
Mme Guyet-
Desfontaines (musée de la Monnaie à Paris)
|
C’est le même Eugène Martineau qui fit la déclaration de succession de
son cousin Guyet-Desfontaines en 1857 à Luçon. À noter qu’il n’était qu’un
cousin très éloigné du beau-frère de Joseph Guyet, Étienne Martineau (15). C’est son
fils, Frédéric Martineau (1826-1876) qui déclara le 7 avril 1869 la succession
d’Antigone Emma Pineu-Duval, veuve de Guyet-Desfontaines au bureau de
Chaillé-les-Marais (no 34, vue 17). Celle-ci l’avait accueilli à Paris dans les années 1840, au
temps de ses études de droit. Et dans une lettre à Marcel de Brayer il lui
écrit : « J’ai reçu hier de Maître Panhard, extrait des
testaments de votre chère grand-mère, et je vous assure que j’étais à mille
lieues de supposer que l’accomplissement du plus élémentaire des devoirs eut pu
m’attirer une si énorme générosité. Ce n’est pas elle qui me devait de la
reconnaissance. C’est moi qui ai été comblé, sa vie durant, de ses bontés et
qui en ai gardé un souvenir ineffaçable. Pour moi qui ai eu le bonheur d’être
admis dans son intimité pendant mon séjour à Paris, elle a eu les attentions
d’une mère, et j’ai conservé de ces trois années une impression qui me charme
encore à vingt ans de distance. »
(16). Mme Guyet-Desfontaines lui avait fait don dans son
testament d’un capital de 20 000 F, somme importante, en reconnaissance
des services rendus par son père et par lui, puisqu’ils s’étaient occupés de
gérer les biens des Guyet-Desfontaines dans le Marais (17).
Dans le bocage, les déclarations de succession furent plus
nombreuses. Pour les métairies des Essarts, elles se sont d’abord
faites au bureau de la Roche-sur-Yon en 1830, puis à celui des Essarts ensuite.
Pour les métairies situées dans le canton de Saint-Fulgent, les déclarations se
sont faites au bureau de Montaigu, puis à celui de Saint-Fulgent à partir de 1886.
Enfin pour la métairie de la Godelinière, les déclarations se sont faites au
bureau des Herbiers en 1830 et en 1857. Pour les terres à Aigrefeuille, on
déclarait au bureau d’Aigrefeuille, mais le registre comprenant les
déclarations de 1830 est inaccessible aux Archives départementales de
Loire-Atlantique en raison de son mauvais état de conservation.
En 1830 c’est Alexandre Gourraud (1791-1853), juge de paix
à Saint-Fulgent et son régisseur sur place, qui déclara les successions de son oncle par alliance Joseph
Guyet, à Montaigu, la Roche-sur-Yon et les Herbiers. Il avait en effet épousé
en 1825 à Saint-Fulgent Rose Adélaïde Martineau (1797-1864), la fille de Catherine
Guyet, sœur aînée de Joseph Guyet.
En 1857, un autre cousin a pris la relève pour déclarer la succession
de Guyet-Desfontaines. Hyacinthe
Narcisse Legras de Grandcourt (1794-1880), alors lieutenant-colonel en retraite
à Saint-Fulgent, fit cette démarche à Montaigu et donna mandat au notaire de Saint-Fulgent, Me Pertuzé, pour la faire aux Essarts et aux Herbiers. Il s’était
marié en 1833 avec Élise Agathe
Martineau
(1799-1875), née à Linières et sœur de Rose Adélaïde citée ci-dessus. M. Guyet-Desfontaines en avait
fait son mandataire pour gérer le domaine de Linières avec toutes ses métairies dès 1853 pour remplacer Gourraud (16). Et lui aussi reçut dans le testament de Mme
Guyet-Desfontaines en 1868 l’usufruit d’un capital de 20 000 F, son fils
Eugène en recevant la nue-propriété.
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Eugène de Grandcourt Source : archives de Vendée |
En 1868, Marcel de Brayer délégua
un clerc de notaire pour faire la déclaration de succession de sa grand-mère à
Montaigu. Mais au bureau des Essarts, il s’est fait représenter par Eugène
Legras de Grandcourt (1834-1883), fils du précédent et régisseur de Linières, et en même temps avocat à Nantes, demeurant rue de Saint-André. C’est d’ailleurs
lui qui fit aussi les déclarations de succession de Marcel de Brayer lui-même
en 1875 aux bureaux de Montaigu et des Essarts. À cette date il avait remplacé son père dans la
gestion du domaine de Linières. On ne fit pas de déclaration aux Herbiers, Mme
Guyet-Desfontaines ayant vendu la Godelinière en 1860 à M. Robert (18).
Ces déclarations de succession
n’ont concerné que les biens immeubles, les biens meubles étant normalement
déclarés au bureau comprenant dans leur ressort le domicile principal du
décédé, qui était Paris en ce qui concerne les châtelains de Linières dans
cette période. Nous avons une exception pour les biens meubles garnissant le
château de Linières, qui étaient déclarés au bureau local de Montaigu puis de
Saint-Fulgent. En 1875 ils sont estimés à 5 064 F, après un inventaire effectué
par le notaire de Saint-Fulgent. En 1889 l’estimation a diminué à 4 543 F.
Les droits de succession
Pour les biens déclarés, les
droits de succession étaient donc payés par les héritiers directement eux-mêmes
à l’administration de l’Enregistrement et des Domaines, au bureau local du
registre de recette des déclarations de mutations par décès. On ne passait pas par
un notaire comme maintenant. En ligne directe de parents à enfants ou
petits-enfants on payait en 1830 et 1857 un droit de 1% de la valeur en capital
du patrimoine. La veuve de Guyet-Desfontaines a dû payer un droit de 3 % en
1868. Pour le grand-oncle Amaury-Duval, héritant de son petit-neveu, les droits
ont été de 7% calculés sur la même base.
On sait que pour des legs faits
dans un testament à des personnes sans lien de parenté avec le testateur, les
droits s’élevaient à 11 % (19).
Pour donner une valeur en capital
aux biens déclarés, on continuait d’appliquer une méthode simple, celle qui
servait depuis très longtemps à racheter les rentes foncières perpétuelle. On
multipliait par vingt le revenu annuel du bien. Pour les métairies des Guyet,
il suffisait de déclarer le loyer perçu auprès des métayers, d’autant que les
baux n’étaient plus chez eux à partage de fruits, où on peut invoquer les aléas
et les difficultés de l’agriculture pour minorer les revenus, mais à prix
d’argent. En 1830 dans le bocage, les revenus déclarés par Alexandre Gourraud furent
nettement inférieurs aux fermages perçus, ce qui ne fut pas le cas dans le
marais, ni ultérieurement. Peut-être est-ce dû à une règle fiscale de
circonstance, car il ne nous est pas possible de soupçonner un juge de paix de
fausse déclaration. Dans ce cas, nous n’avons retenu dans nos calculs pour nos
analyses que les valeurs des fermages pour les métairies où nous les
connaissions.
Les prix des fermes de 1830 à 1868 dans le marais et dans le bocage
Les revenus déclarés
comprenaient, outre le fermage, la valeur des menus suffrages. On se souvient
qu’il s’agissait de la fourniture annuelle de quelques volailles et cire
d’abeilles, lin (désigné par le mot fil), etc. Ils étaient variables et propres
à chaque bail, se montant à 15 F en général par an, ou 30 F quand on rajoutait
la valeur des corvées. Dans le bocage, on voit que la vente de paille en 1857 a
constitué un revenu du propriétaire dans certaines métairies.
Dans le marais il fallait aussi
ajouter la cotisation au syndicat chargé d’entretenir les canaux et
installations des marais desséchés, qui était payée par les fermiers.
L’administration les considérait comme des charges de propriétaires et réintégrait
leurs montants dans les revenus perçus. Il en était de même des impôts fonciers
qui avaient remplacé les anciennes redevances seigneuriales. Ils continuaient
d’être payés par les fermiers généralement, mais le fisc en réintégrait la
valeur dans les revenus des propriétaires. Il reprenait, se faisant,
l’argumentaire des propriétaires au moment de la Révolution. Quand certains
métayers demandèrent à bénéficier de la suppression des droits féodaux, et à ne
pas payer les impôts fonciers qui les avaient remplacés, les propriétaires
rétorquèrent que cette suppression revenait à eux et non pas aux fermiers.
Sinon il leur faudrait augmenter le fermage. Dans un total de fermage
de 31 889 F,
les impôts fonciers se montaient à
1 900 F, soit 6 % du montant du fermage
en moyenne. Cette valeur est nettement moindre que le seul droit de terrage
féodal d’autrefois, le plus souvent à 16 % dans la région (la « sixte
partie des fruits »).
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La Morelière |
Les prix annuels des fermes en
1875 classent les métairies du bocage en deux catégories. Il y a celles de bons
rapports avec un fermage autour de 50 F l’hectare pour la Grande Roussière, la
Chantonière, la Roche au Roi, le Vrignais, la Mauvelonnière et la Morelière.
Les métairies de moins bons rapports, avec un loyer autour de 43 F l’hectare
sont la Fontaine, la Morinière, les Noues, le Bourg de Saint-André, Linières et la
Guérinière.
Que nous apprennent les valeurs
de revenus déclarés en 1830, 1857 et 1868 ?
Dans cette période de 38 années,
les fermages dans le marais ont augmenté pour l’ensemble des propriétés de 105
%, dont 77 % dans les 27 premières années et 15 % dans les 11 années suivantes. Il
n’est pas facile d’analyser ces augmentations dans le détail des propriétés, à
cause des changements importants de leurs périmètres. Seules deux métairies,
mais totalisant 252 hectares (54 % du total des surfaces), peuvent être suivies
sur l’ensemble de la période. Leurs deux revenus n’augmentent que de 46 % de
1830 à 1857, mais de 20 % de 1857 à 1867. On peut en déduire que les
augmentations de revenus ont été plus élevées sur les autres locations, et que
les importants changements de périmètre des domaines loués avaient pour but d’y
contribuer.
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Tableau de Julien Dupré |
Dans le bocage les augmentations
de revenus peuvent être observées sur 8 métairies totalisant près de 400 ha. De
1830 à 1857, l’augmentation moyenne est de 31 % seulement, soit un peu moins de
la moitié de celle observée dans le marais. L’élevage, qui rapportait davantage
alors, y était moins pratiqué. Faut-il retenir que les reconstructions
consécutives à la guerre de Vendée ont pu plomber les revenus dans le bocage,
ce qui n’a pas été le cas dans le marais, exempt des combats et
exterminations ? Nous ne le pensons pas, car la période d’observation commence
après trente années de reconstruction.
De 1857 à 1868 les augmentations
de revenus dans le bocage sont en moyenne de 50 %, c'est-à-dire plus fortes que
dans le marais. C’est beaucoup sur une aussi courte période. Et dans la période
suivante, de 1868 à 1875 (succession de Marcel de Brayer), les revenus dans le
bocage augmentent encore de 27 %. Ce qui a changé est la mise en œuvre des
progrès techniques, supprimant l’assolement avec jachère et favorisant les
cultures fourragères. Celles-ci ont permis de développer l’élevage alors que
ses ventes ont connu une forte hausse des prix pendant la période. Dans le même
temps, les prix des céréales ont peu augmenté, favorisant le mouvement vers
l’élevage. D’autant que les progrès techniques ont aussi concerné l’élevage
avec les efforts des autorités pour les développer. L’époque a connu par
exemple le lancement des comices agricoles cantonaux en Vendée, où des fermiers
de Linières ont obtenu des premiers prix.
En restant sur la période de 1830
à 1868, l’augmentation moyenne dans le bocage s’élève à 96 %, très proche de ce
qu’on observe dans le marais. On serait tenté de voir dans ces chiffres les
richesses apportées par les nouvelles techniques de charrues en fer et des
engrais, dont ont surtout bénéficié les terres du bocage. Ces nouvelles
techniques ont permis d’y développer l’élevage, dont les prix ont augmenté en
France jusqu’en 1875 précisément, diminuant ensuite. Mais alors pourquoi le
marais a lui aussi connu une hausse aussi importante des revenus agricoles dans
notre exemple ? Il faudrait d’abord vérifier l’évolution régionale des
prix agricoles à cette époque, au lieu des indications nationales, pour poursuivre l’analyse.
Au terme de cette présentation
sur cette immense fortune, on est curieux de savoir comment elle a été
dilapidée en si peu de temps ensuite, aboutissant même à la disparition du
château tout neuf de Linières.
Les évolutions de 1875 à 1897
Amaury-Duval s’est défait des
possessions des Guyet dans le marais poitevin. On ne trouve pas en effet de
déclaration de sa succession au bureau de Chaillé-les-Marais en 1886. Et il a
vendu trois métairies du domaine de Linières, faisant passer la surface
possédée de 750 hectares à 600 hectares. Il s’est séparé de la Gagnolière et de
la Nouette aux Essarts, ainsi que de la Chantonière à Saint-Fulgent. La perte de
revenus correspondante a été en partie compensée par une hausse de 10 % en moyenne
des fermages de 1875 à 1885. Était-ce nécessaire de vendre pour payer les
travaux de construction de la conciergerie et des bâtiments de la métairie de
Linières « gauche », occupée alors par la famille Brochard ? Nous
n’avons pas eu accès aux comptes et nous ne pouvons pas répondre.
Néanmoins on estime qu’en 1868,
au moment de sa succession, Mme Guyet-Desfontaines, avaient des revenus annuels
d’environ 100 000 F, dont 90 700 F de revenus immobiliers répartis ainsi :
-
32 000 F provenant de la terre de Linières
composée de diverses métairies situées sur les communes de Chauché, Saint-André,
les Essarts et Saint-Fulgent
-
32 200 F provenant de la terre de Champagné
composée de terres, prés, bâtiments, située sur les communes de Champagné les
Marais et Puyravault
-
16 000 F des loyers d’un immeuble à Paris
rue du Faubourg Montmartre, no 47, plus 10 500 F de valeurs financières
provenant d’autres immeubles habités ou loués
C’est le montant des revenus
immobiliers qu’a déclaré Marcel de Brayer, sur la demande du receveur de
l’Enregistrement à Paris. À ce total de 90 700 F, on peut aisément ajouter
les revenus des placements financiers pour aboutir à 100 000 F de revenus
annuels, et ceci probablement en net (20).
Maintenant
il ne faut pas oublier la générosité de Mme Guyet-Desfontaines dans sa succession
en 1868, qui a distribué 13 100 F de rentes annuelles viagères, dont 10 000
F pour son frère Amaury-Duval de la même génération qu’elle. Elle a aussi fait
verser des capitaux à 15 personnes, se montant à un total de 108 700 F.
Son petit-fils Marcel de Brayer s’est contenté de recommander dans son
testament la continuation du versement des rentes décidées par sa grand-mère,
et n’a pas fait de dons en argent. Mais il a lui-même beaucoup dépensé. Une
indiscrétion policière nous apprend qu’il a payé 150 000 F pour installer
une maîtresse avec qui il vécut dix-huit mois à Paris (21). Et il construisit
le nouveau château de Linières.
On pourrait naturellement,
s’agissant d’un grand-oncle héritier, se demander si l’impôt sur les
successions n’a pas pesé sur le patrimoine. Imposé à 7 % du capital en 1875, il
a payé un impôt sept fois plus élevé que pour une succession en ligne directe.
Mais cela a représenté l’équivalent d’à peine une année de revenus. Son cousin
au 5
e degré, Eugène de Marcilly, a payé une imposition de 9 % du
capital en 1885. Mais le calcul du capital était passé entre temps de 20 fois
le revenu annuel à 25 fois. L’impôt sur les successions a ainsi représenté pour
le cousin l’équivalent d’un peu plus de deux années de revenus. Vu
d’aujourd’hui c’est très peu, où le prélèvement est proche de 60 % pour des cousins
au-delà du 4
e degré de parenté, organisant une ponction par l’État équivalent
à la valeur du patrimoine, en deux générations de cousins. Ce n’est donc pas le
fisc qui est à l’origine de la fin du domaine de Linières.
La disparition du régisseur
Eugène de Grandcourt fut aussi un malheur au plan matériel pour le domaine de
Linières. Après la disparition de ce dernier, Amaury-Duval voulu confier sa
fonction de régisseur au notaire de Saint-Fulgent qui s’occupait de ses affaires,
Me Cahors. En final ce fut un clerc de notaire de ce dernier qui fut choisi, Pierre
Brevet, aux termes d’une procuration du 15 mai 1883. Le choix ne fut pas
heureux, l’intéressé acheta un cabinet d’huissier à Palluau, mais il s’est dit
qu’il avait été destitué de cette fonction. Après quoi il serait revenu s’installer
comme forgeron à Saint-Fulgent ! (22).
|
Gaston de Marcilly (dessin de J. Levis) |
M. Eugène de Marcilly, qui a
hérité du domaine légué par Amaury-Duval, a conservé intacte les métairies
possédées, semble-t-il. Mais lui aussi dû faire face à la
générosité testamentaire d’Amaury-Duval cette fois (23). Passons sur les
donations en nature, de ses tableaux en particulier, que nous ne pouvons pas
évaluer. Il n’a distribué en capital qu’une somme de 22 700 F à six
personnes différentes, la valeur d’une douzaine d’hectares en bonne terre. Mais
en rentes viagères annuelles il légua un montant total de 30 600 F, ce qui
représentait une quantité importante des revenus du patrimoine légué. Avait-il conscience
que ses successeurs pouvaient ne pas être aussi modestes que lui dans leur train de vie ? En tout
cas il était sensible au sort de ses proches. Parmi les 19 bénéficiaires de ses
rentes il y eut la jeune femme, Anne Depitre, qui l’a aidé en tout bien tout
honneur dans ses dernières années de vieillesse : elle reçut 10 000 F
de rente viagère, dont 3 000 F réversible pour sa fille. Significatives sont
les rentes pour le curé de Saint-André-Goule-d’Oie et pour celui de Saint-Hilaire-de-Mortagne
(auparavant vicaire à Saint-André) : 600 F chacun. Elles étaient données
pour les secours aux pauvres de la paroisse en réalité. Le jardinier Roulleau
reçu 300 F de rente. Jusqu’en 1941 on trouve trace d’une inscription au
bureau des Hypothèques à Paris au profit d’un bénéficiaire d’une rente viagère
d’Amaury-Duval remontant à 1886 (23). On a là un cas limite, mais il est sûr
que pour ses légataires, les rentes viagères d’Amaury-Duval ont constitué un
poids. Ses héritiers se sont crus plus riches qu’ils n’étaient probablement.
C’est par un même acte, devant un
notaire de Paris en juin 1886, que fut enregistré le consentement aux legs par
le légataire universel, Eugène de Marcilly, des deux prêtres cités et du
jardinier. Pour les deux premiers celui-ci a affecté une hypothèque à hauteur
de 12 000 F chacun, et de 6 000 F pour le jardinier, gagée sur un
immeuble de 540 m2, avenue de Villiers à Paris, lui appartenant. En
conséquence les bénéficiaires des rentes « se sont désisté du privilège
résultant du testament en ce qu’il frappe la terre de Linières », ne
conservant le privilège testamentaire que pour un immeuble du Faubourg
Montmartre faisant aussi partie de l’héritage (24). Cette volonté d’Eugène de
Marcilly de privilégier Linières dans la gestion de l’héritage est à souligner
quand on connaît la fin.
C’est après
Eugène de Marcilly, avec ses fils Gaston et Guy de Marcilly, à partir de 1890,
que la situation financière du propriétaire s’est détériorée et qu’on a vendu
des métairies. On a retrouvé notamment la
vente des deux métairies des Grandes Roussières et de la Fontaine à Saint-Fulgent,
à un nommé Rouzeau le 19 avril 1894 (notaire Baland de Saint-Fulgent), pour 115 000
F. au total. Leurs fermes annuelles s’élevaient alors à 5000 F. après impôt
foncier (25).
Puis le domaine fut vendu en 1897 aux enchères publiques par le tribunal civil
de première instance de la Roche-sur-Yon. L’ensemble ne comptait plus alors que 385 hectares,
avec 8 corps de ferme (26). La vie dispendieuse du dandy qu’était Gaston de Marcilly, jouant
aux courses pas toujours avec bonheur, constitue un élément d’explication à sa déconfiture
financière.
Le domaine
de Linières en 1897
Le cahier
des charges de cette adjudication judiciaire en 1897 décrit par le détail les
parcelles foncières du domaine de Linières, nous donnant des informations intéressantes
(27). D’abord le château de Linières et ses dépendances occupent 22 hectares,
dont 7,6 ha pour le château lui-même, ses allées, jardins, chemins, l’étang et
une mare. Le parc du château (1,7 ha) et le bois proche, dit de la Bergère font
6,6 ha. Les 7,8 ha du bois du Vrignais constituent en plus une réserve du
château. En 1897, il y a deux maisons inoccupées à Linières, à côté de la
conciergerie. Le métayer de la ferme de Linières habite dans des bâtiments
neufs situés plus à l’ouest et à l’écart du château (ancienne métairie dite de « gauche »).
Peu après le nouveau propriétaire, Louis de la Boutetière, fera construire la
Louisière et démolir les deux maisons inhabitées. Seule la conciergerie, avec
son architecture originale, restera à l’entrée de la cour du château.
Ajoutées aux 22 ha du château et ses dépendances, les 8 métairies comptent 363 ha :
Linières (35 ha), Logis du Bourg de Saint-André (38 ha), Bourg de Saint-André (27
ha), Guérinière (64 ha), Mauvelonnière (45 ha), Bois du Vrignais (53 ha),
Morelière (51 ha) et Noues (50 ha). Le domaine ne vivait donc que d’agriculture,
et l’indication des cultures en cours au mois d’octobre 1896 par l’huissier de
Saint-Fulgent, qui a inventorié le domaine, nous donne une photographie
représentative de l’époque dans les grandes métairies de la contrée. Les prés,
pâtures et guérets occupaient 20 % des surfaces en culture, et les plantes
fourragères destinées à l’élevage occupaient 40 %. Une modeste culture du lin
représentait 1, % des surfaces, les vignes avaient disparu sauf au Bois du Vrignais,
et 9 % étaient en chaume ou non emblavé, c’est-à-dire attendant les travaux du
printemps à venir. Les champs emblavés en céréales représentaient 30 % du
total cultivé, dont 60 % en froment, 37 % en avoine et 3 % en seigle. Ce dernier, qui
avait dominé les cultures jusqu’au 18e siècle, avait presque disparu.
L’élevage
était devenu prépondérant, poussé par la demande et permis par l’usage des engrais
depuis le milieu du siècle. Les plantes fourragères dominantes étaient le chou et le trèfle, presque à égalité, représentant 86 % du total des plantes cultivées.
Les rèbes en représentaient 8 % et le petit reste de 6 % se répartissait entre
les bettes champêtres, les carottes, la luzerne, la garobe (vesce), le colza et
le coupage. Ce dernier était un mélange de graines (colza et vesce par
exemple). Dans cette pratique culturale observée dans les 8 métairies du
domaine, on ne voit pas de particularité pour un métayer, tous faisaient les
mêmes choix, y compris pour s’essayer aux autres plantes fourragères que
le chou et le trèfle.
La fin
du domaine (1897-1912)
Puis l’acquéreur du domaine en
l’audience des criées du tribunal de la Roche-sur-Yon, M. Auriault, vendit la
métairie des Noues à Célestin Loizeau, de Nantes, puis celle du bourg de Saint-André à Maixent Girard, géomètre-experts habitant à proximité dans le bourg.
Il vendit aussi le logis du bourg au curé de Saint-André et répartit les terres
de la métairie du logis dans ses métairies voisines. Dix mois après son acquisition il revendit en 1898 le
domaine de Linières, dont la contenance avait été ramenée à 300 ha. On ne
comptait plus alors que les métairies de Linières, de la
Morelière, la Mauvelonnière, la Guérinière et le Bois du Vrignais. On n’a pas encore
repéré à quelles dates furent vendues les deux métairies de Saint-Fulgent, de la
Morinière et de la Roche au Roi. L’acquéreur et dernier
propriétaire de Linières s’appelait Louis de la Boutetière.
Dans cette évolution de la
composition du domaine de Linières, apparaît aussi temporairement la métairie du Logis du bourg de Saint-André. Elle fut acquise des héritiers de Tinguy à une date non
repérée au temps d’Amaury-Duval ou d’Eugène de Marcilly. Elle devait compter 24
hectares, surface connue en 1814. Le nouveau propriétaire logea le métayer dans
le logis et augmenta la surface exploitée par transferts de parcelles voisines
provenant de ses métairies de Linières, de la Mauvelonnière et du bourg de
Saint-André. En avril 1897 la métairie comptait 37,8 hectares, au moment de la
vente par adjudication du domaine de Linières. L’adjudicataire, Augustin
Auriault, vendit le logis à la fin de l’année 1897 au curé de Saint-André pour
en faire un presbytère. Ensuite il fit démolir les bâtiments d’exploitation et
réparti les terres dans ses métairies voisines.
(1) Informations données par M. Daniel Priouzeau.
(2) Archives de Vendée, Recueil des actes administratifs de la préfecture de la Vendée : 4 Num 219/73 no 1 à 17 (1882), page 309 vue 302 et s.
(3) aveu du 23-6-1774 de Saint-Fulgent (Agnan Fortin) à la vicomté de Tiffauges (A. L. Jousseaume de
la Bretesche), transcrit par Paul Boisson, Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 13, page 19.
(4) ibidem. Page 21.
(5) ibidem. Page 26, 27 et 28.
(6) Accord du 27-12-1724 entre les teneurs de Puyravault Haut et Bas, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/C 6.
(7) vente de la borderie la Vallée (Essarts) du 29-5-1773 de Parpaillon à Alexis de Lespinay Archives de Vendée, notaires de Saint-Fulgent, Thoumazeau : 3 E 30/121.
(8) Transaction sur rente foncière de Villeneuve du 25-3-1808, Archives de Vendée, notaire de Saint-Fulgent, papiers Guyet : 3 E 30/138.
(9) Archives de Vendée, vente de biens nationaux 1 Q 259, no 917, vente de la Godelinière du 2 floréal an 6 (21-04-1798) à Joseph Guyet.
(10) Archives de la Vendée, notaires de Chavagnes-en-Paillers, Bouron : 3 E 18/18, ferme du 5 nivôse an 6 de la borderie des Loges de Mme Duviger à Hervouet.
(11) J. Biteau, Le Général de Lespinay (1789-1869), Le Lys et le Lin Éditions, 2024, p. 92.
(12) Archives de Vendée, Chartrier de Roche-Guillaume, famille Moreau : 22 J 29, déclarations roturières diverses de Pierre Moreau vers 1675.
(13) Archives de Vendée, étude de notaire de Saint-Fulgent, papiers Guyet : 3 E 30/138, bail du Bois de Vergnais du 8-7-1829 de J. Guyet à Bossu, Brodu et Belamy pour la période du 23-4-1830 au 23-4-1837.
(14) Archives de Vendée, Chartrier de Roche-Guillaume, famille Moreau : 22 J 29, déclarations roturières diverses de Pierre Moreau vers 1675.
(15) Famillevendeennes.fr
(16) Archives de la Société Éduenne d’Autun, Fonds Amaury Duval : K8 34, lettre de Frédéric Martineau à M. de Brayer du 4-12-1868.
(17) Déclaration de la succession de Guyet-Desfontaines, au bureau de Montaigu le 5-10-1857 no 188 (vue 98).
(18) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 20, famille Guyet.
(19) Actes testamentaires de Laure Longuemare, veuve Charles Louis Guyet, Archives nationales, études notariales de Paris, Me Pitaux : MC/ET/XIV/850.
(20) Idem (17).
(21) Gabrielle Hoube, Le livre des courtisanes, archives secrètes de la police des mœurs Tallandier, 2006, page 320.
(22) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 32-3, témoignage de C. B.
(23) Écrits testamentaires de M. Amaury Duval, Archives nationales, études notariales de Paris, Me Pitaux : MC/ET/XIV/1032.
(24) Hypothèque pour la rente d’Amaury-Duval au curé Martin et autres, Archives de la paroisse de Saint-Jean-les-Paillers, relais de Saint-André-Goule-d’Oie : carton no 31, chemise XIII.
(25) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 32-1, copie de l’acte de vente du 19-4-1894 des métairies des Grandes Roussière et de la Fontaine par Guy de Marcilly et sa mère à Rouzeau.
(26) Archives de la Vendée, L’Avenir et l’Indicateur de la Vendée du dimanche 7 mars 1897 no 28 :
4Num 366/13, vente sur saisie immobilière du domaine de Linières, page 4. Et vente par adjudication de Linières le 6 avril 1897, Archives de Vendée, cahier des charges des adjudications (1897-1039) : U 1-354.
(27) vente par adjudication de Linières le 6 avril 1897, Archives de Vendée, cahier des charges des adjudications (1897-1039) : U 1-354.
Emmanuel François, tous droits réservés
Fantastic post however , I was wanting to know if you could write a litte more on this topic? I'd be very grateful if you could elaborate a little bit more. Cheers! netflix login member
RépondreSupprimerL'histoire des propriétaires cités dans l'article fait l'objet d'autres articles dans le même site. Les modes de faire valoir des métairies du bocage aussi.
RépondreSupprimerQuant au récit de la fin du château, c'est volontairement que j'ai gardé le silence sur certains noms et certains détails, pour éviter de froisser des descendants, alors même que l'essentiel est dit. Deux motifs :
1° Nous sommes en grande partie dans une histoire privée,avec une dimension collective limitée.
2° Ces personnes privées vivaient encore il y a un siècle (par exemple mon grand-père en faisait partie)