Du 13e au
17e siècle, les seigneurs de Saint-Fulgent ont été des nobles du Bas-Poitou se succédant par
héritages et mariages dans une généalogie connue. Les paroissiens de Saint-Fulgent, n’ont que très peu vu les seigneurs du lieu, qui
n’habitaient pas sur place. Heureusement pour eux, car après le temps des
vauriens et des assassins, vint le temps des pirates et des marchands
d’esclaves. Après 1720, la seigneurie a été en effet la propriété d’importants
négociants nantais, qui n’y ont pas habité eux non plus. À ce titre ils avaient
des droits seigneuriaux à la Boutinière, Chevaleraye et Javelière (Saint-André-Goule-d’Oie).
Ils en étaient seigneurs au moins en partie, sinon à part entière, se battant
pour cela contre le seigneur de Languiller. Leur histoire personnelle nous
éloigne de Saint-Fulgent, et il faut se rendre
à Nantes pour la découvrir.
Dans cette première
moitié du 18e siècle on assiste dans la contrée à une concentration
des seigneuries entre les mains de riches seigneurs. On va le voir à
Saint-Fulgent, et ce fut le cas aussi à la Rabatelière où un autre négociant
nantais, René Montaudouin, va venir acheter la Chapelle Begouin, la Rabatelière,
Languiller, la forêt de Gralas, la Roche de Chauché et la Grassière (Chavagnes).
Les plus gros rachètent les petits, comme le duc de Mortemart qui acquit
Montaigu et la Rocheservière, le rendant maître de 14 paroisses. Le duc de Villeroy
achète Mortagne et Chambretaud (1).
Joachim Descazeaux (1667-1732)
Paul Nassivet : Vue de Nantes
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Il acheta la seigneurie de Saint-Fulgent
en 1720 pour 122 700 livres, douze ans avant de mourir,
débarquant sur les lieux en vieux pirate à bas de soie pour y placer une petite
partie de ses profits. Il avait fait des placements bien plus rentables au
cours de sa vie, mais la seigneurie de Saint-Fulgent possédait une valeur d’un autre ordre et éminente à cause de sa nature
noble et de
ses origines, remontant au temps des croisades et des chevaliers du Moyen Âge.
La vie de Joachim Descazeaux, brillante et aventureuse, ne doit rien à Saint-Fulgent. Elle est celle d’un armateur nantais qui vaut qu’on la
raconte, même si elle nous éloigne de la Vendée. Nous empruntons pour cela à J.
Meyer, qui a étudié la trajectoire de Joachim Descazeaux, seigneur du Hallay et
de Saint-Fulgent.
Ses origines et sa famille
Il était fils d’un
basque de Bayonne, Pierre Descazeaux, venu s’installer à Nantes. Pierre
Descazeaux demeurait au quartier de la Fosse à Nantes, paroisse de Saint-Nicolas. Il y épousa Marie François en 1659, alors âgée de 23 ans. Elle était
la fille de Mathurin François, sieur de Beausoleil et de la Gourtière, et de
Françoise Fruneau, à la tête d’une importante fortune (2). L’apport de Marie
François aida son mari à se propulser dans le négoce. Ils héritèrent en 1661 du
manoir de la Foliette à la Haie-Fouassière (Loire-Atlantique), qui passa par
héritage à leur fils ainé, Pierre Julien, frère de Joachim.
Les François sont une famille aux
nombreuses ramifications qu’on retrouvera aussi en Vendée, comme nous le
verrons plus loin. Les François de Nantes exploitaient du minerai de fer et une
forge à Riaillé près de Chateaubriant (Loire-Atlantique). Les propriétaires en avaient
été les Penthièvre, par ailleurs barons des Essarts. La famille Monthulé, aussi
importante famille du négoce nantais dès le 17e siècle, y eut des
intérêts (3). Entre eux se nouèrent des alliances, familiales et probablement
financières. Un Thomas François, sieur de Maleville, épousa au début du 17e
siècle Catherine de Monthulé. Et on ne sera pas étonné plus tard de constater
qu’un Jean-Baptiste de Monthulé,
conseiller au parlement de Paris, soit exécuteur testamentaire de
Joachim Descazeaux.
Pierre Descazeaux et Marie
François eurent au moins quatre enfants connus, dont l’un mourut en bas âge en
1679.
En 1693, lors du partage de
la succession de Pierre Descazeaux, sa
veuve, Marie François, fit appel à la décision du conseil de famille
comme arbitre. Les intérêts sont bien entendu financiers. Quand Pierre décède,
leurs enfants sont mariés et majeurs. Les droits de succession ont déjà été
réglés par les contrats de mariage. En fait, au décès de leur père, les trois
enfants – dont une fille, Françoise – réclament la valeur des biens promis lors
de leur mariage, et qu’ils n’ont jamais reçus : leurs parents en ont
disposé. De plus, les époux se sont faits une donation mutuelle. Marie François
accepte un partage mais garde la jouissance d’un bien immeuble afin que « le présent acte puisse opérer une paix et
tranquillité stable entre elle et ses enfants ». Elle reconnaît les
actions positives de ses deux fils (Pierre Julien et Joachim) grâce à leur négoce,
c’est-à-dire le remboursement d’une grande partie des dettes. En 1689 ces
dettes de leur père s’élevaient à 121.000
livres. Joachim, le second fils, avait repris le négoce de son père
dès 1689 et déjà remboursé 77 965 livres. Les enfants héritent encore de 23 840
livres de dettes ! Pourtant, Marie François leur demande de ne pas
prétendre aux sommes payées pour dettes du défunt, « jusqu’après son décès... pour les voir bien unis... À quoi ledit
sieur du Hallay [Joachim] a dit qu’il
se remarque une prédilection de ladite demoiselle sa mère en faveur de son
frère aîné et de sa sœur ». Il accepte néanmoins le partage « pour mieux s’acquérir son amitié et celles
de son frère et de sa sœur ». Les rivalités entre frères et sœurs sont
mises en évidence : la préférence d’une mère pour certains de ses enfants
est ici dénoncée. Marie François est partagée entre son rôle de mère et celui
de responsable du capital de la famille, comme l’écrivent les chercheurs Nicole Dufournaud et Bernard Michon (4). Elle mourut en 1704 (2).
Port de Nantes en 1776
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Pierre Julien, dit Descazeaux
de la Foliette, frère aîné de Joachim se lança lui aussi dans le négoce
maritime. En 1706 il fit son premier départ de bateaux de Nantes, en
même temps que René Darquistade, tous deux armés par Joachim. Les Descazaux ont
participé à l’essor du commerce nantais à partir des années 1670-1680.
Ses activités d’armateur à Nantes
Joachim Descazeaux, le
futur châtelain de Saint-Fulgent, pratique d’abord le commerce avec les
îles, les mers du Sud et l’armement morutier. Les
mers du Sud désignaient dans le vocabulaire de l'Ancien Régime, en
particulier celui des pirates corsaires et armateurs, les côtes pacifiques de
l'empire espagnol. S'y trouvaient les riches villes minières du Pérou et du
Potosi (Colombie). L'expression de « Mers du Sud » signifiait bien
souvent « Océan Pacifique », un espace réservé habituellement à l'empire
espagnol.
Le ministre Pontchartrin
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Au moment de la guerre de la Ligue d'Augsbourg (1688-1697), Joachim Descazeaux est le principal négociant nantais. Dès 1691,
il organise outre-Atlantique des expéditions à Placentia avec le secrétaire d'état à la Marine Louis II Phélyppeaux de Pontchartrin (1643-1727), pour le ravitaillement de Terre-Neuve
en ce temps de guerre. Les pêcheurs basques pêchaient
dans le secteur des grands bancs de Terre-Neuve dès le début du 17e
siècle, utilisant la rade de Plaisance ou Placentia comme centre saisonnier des
opérations. Le site comporte une grande plage rocheuse permettant le séchage
des poissons. En 1655, les Français, installés sur plus de la moitié des côtes
de l'île de Terre-Neuve et la
majeure partie du Canada atlantique, font de Plaisance un port important. Des
forts, dont le fort Louis qui contrôlait l'entrée du port, sont construits et
des garnisons de soldats y sont maintenues. Les Anglais occupaient la côte est
entre Bonavista et Fermeuse. Apporter de l’aide aux colonies françaises de
Terre-Neuve pendant la guerre contre les Anglais, c’était rendre service au roi
et Descazaux s’est formé ainsi d’utiles relations. Il fut par exemple ami du
fils de Colbert. Les ennemis de Louis XIV sur les mers étaient nombreux pendant
la Ligue d’Augsbourg : Anglais, Hollandais, Espagnols, principalement.
S’attaquer à leurs navires marchands relevait du patriotisme et pouvait
rapporter gros. Armer un bateau nécessitait beaucoup d’argent, mais le profit
pouvait être important. Et Joachim Descazeaux s’enrichit notablement à
cette époque.
En 1703, un de ses navires revint d'une
expédition de corsaires malouins dans les mers du Sud avec un butin de piastres d'argent évalué à
près de 3 millions de livres. Il avait l’obligation de livrer les métaux
précieux à l’hôtel des monnaies appartenant au roi pour un prix inférieur au
marché, mais les armateurs et marins s’adonnaient à la fraude.
Descazeaux était un négociant en
vue. Le mot de « négociant » distinguait du vulgaire marchand et
apportait du prestige social. Parfois assimilé par les lettres de noblesse aux
militaires, auréolé de la gloire des combats de
course, mais aussi secrètement jalousé, le négociant formait l’aristocratie de
la ville de Nantes. Ce milieu très fermé fut dominé par un groupe d’armateurs
richissimes, dont faisaient partie Descazeaux, son neveu par alliance
Darquistade et la famille Montaudouin (dont un membre était devenu seigneur de
la Rabatelière 1725, lui aussi). Ils construisirent de magnifiques résidences
près de la bourse de Nantes et sur le quai de la Fosse.
Maison
de Tourelles au Quai de la Fosse
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Les
Descazeaux habitaient à l’entrée de la Fosse dans l’immeuble dit des tourelles,
où avait été signé l’édit de Nantes. Dans ses souvenirs, F. Lefeuvre
décrit « ces importants personnages
appuyés sur leurs hautes cannes à pommeau d’or », se rendant à la
Bourse, « ne se mêlant jamais, que
lorsque les affaires l’exigent, au commun des mortels ». Habillés en
« grande toilette de ville, coiffés,
poudrés, en habit de soie de couleur sombre ou tendre suivant la saison, en
longue veste et culotte également de soie, bas blancs et souliers à larges
boucles d’or ou d’argent », ils portent l’épée au côté, comme
n’importe quel noble. En 1629 le roi avait autorisé des nobles à pratiquer
le grand commerce sur mer, sans déroger. Puis on anobli des négociants sous
réserve qu’ils continuent à commercer.
Député au Conseil du Commerce
Dans le Conseil du Commerce créé
en 1701 auprès du roi, Joachim Descazeaux
en est le premier député de Nantes. On trouve à la bibliothèque municipale de
Viré un Mémoire du sieur Descazeaux du Hallay, député de Nantes à la chambre du
Conseil de Commerce, établie pour le Roy à Paris par rapport à l'état présent
du commerce en général (1701).
Il
souligne que les compétences maritimes acquises lors de la guerre ouvrent des
horizons commerciaux beaucoup plus vastes, sur le modèle de ce qu'ont réussi
les Hollandais et les Anglais. Contre
un certain « colbertisme », il défend le principe du libéralisme dans
le commerce, et recommande la suppression des privilèges des compagnies
maritimes.
Il fut anobli par la charge de
secrétaire du roi en 1702, quand il quitta le Conseil du Commerce.
Son épouse et ses relations à Luçon et à Saint-Fulgent
La première épouse de Joachim Descazeaux,
Françoise Sarsfield, est la fille de Paul Sarsfield, lui
aussi armateur, de la communauté des Irlandais de Nantes. Le demi-frère de Françoise, Patrick Sarsfield, né vers 1660 à Lucan (Irlande), est un militaire irlandais
du parti jacobite, qui a combattu au service de Jacques II, roi d’Angleterre et
d’Irlande, puis de Louis XIV entre 1671 et 1693. Cette guerre politico-religieuse provoqua un lot de réfugiés « irois » ou « jacobites »
(irlandais et partisans de Jacques II) en France, fuyant les persécutions des
protestants ayant renversé Jacques II. La paroisse de Saint-Nicolas de Nantes
en compta beaucoup, notamment des prêtres et des religieuses catholiques, mais
aussi des marins et de riches négociants. L’arrivée des Irlandais
a contribué à la même époque au renforcement du négoce local.
Devenu veuf en Irlande et naturalisé en 1678,
Paul Sarsfield s’est remarié en 1672 avec Guyonne François, fille d’Antoine
François, sieur de la Briaudère, échevin de la ville de Nantes, et Françoise
Saligot. Elle était probablement parente de Marie François, la mère de Joachim
Descazeaux.
Elle était aussi proche parente d’une autre
Marie François de la Sanglaire qui épousa Pierre Coutouly, écuyer, maire de Luçon
et receveur des décimes du diocèse Bas-Poitevin. Il possédait une
borderie à la Ridolière de Saint-André-Goule-d’Oie. Elle lui était venue de sa
première femme originaire de Saint-Fulgent, Marguerite Proust, décédée le 16
novembre 1712 à Luçon (vue 205 sur le registre paroissial numérisé et accessible
sur le site internet des Archives de la Vendée). Au baptême du premier enfant
de Pierre Coutouly et de Marie François, Joachim, le 24 juillet 1716 à Luçon (vue
81), le parrain est Joachim Descazeaux. Ne pouvant être présent ce jour-là,
c’est le sénéchal de Saint-Fulgent et avocat, Louis Prosper Proust (1685-1745),
qui tint l’enfant en son nom sur les fonts baptismaux.
Pour le baptême du deuxième
enfant, Pierre Louis, le 23 août 1717 (vue 105), le parrain est le même Louis
Prosper Proust. La marraine est Françoise Sarsfield,
épouse de Joachim Descazeaux. En l’absence de cette dernière, l’enfant est tenu
sur les fonts baptismaux par Françoise Daïherre, la deuxième épouse de Louis
Prosper Proust. Ce dernier, rappelons-le, était le frère de Marguerite Proust,
la première épouse de Pierre Coutouly. Et Perrine Daïherre, avait pour mère une
Perrine François, probable parente des autres François. Ainsi sont nées les
liens entre le sénéchal et notaire de Saint-Fulgent avec le futur châtelain des
lieux. Ils ont été assez proches pour que Françoise
Sarsfield soit la marraine de Françoise
Proust, la fille de Louis Prosper Proust et de Perrine Daïherre, le 2 juillet
1718 à Saint-Fulgent (vue 68).
Ses acquisitions de domaines seigneuriaux
C’est en effet en 1720 que
Joachim Descazeaux acheta la seigneurie de Saint-Fulgent pour 122 700
livres. Elle avait été saisie à son propriétaire, Louis
Gabriel Charles Gazaux, qui avait été condamné à mort par contumace,
coupable de l’assassinat de Charles-Daniel de Montsorbier demeurant à la
Brallière (Boulogne).
Joachim Descazeaux eut un fils unique, Pierre
Descazeaux, né en 1693 qui devint conseiller au parlement de Paris. Devenu
veuf, Joachim Descazeaux se remaria en 1721 avec Marie-Henriette de Briquemault,
marquise de Férole (5). Elle appartenait à la branche des marquis de Rothelin
de la famille des Orléans, faisant partie de la maison royale. Ce mariage signait
évidemment sa brillante ascension sociale.
Joachim Descazeaux acheta le château
du Hallay au Pallet (Loire-Atlantique). En 1718 il avait acheté la châtellenie
du Gué au Voyer et celle de la Sénéschallière à Saint-Julien-de-Concelles (Loire-Atlantique)
à Mme de Mortemart. Il en fit hommage au roi en 1723. En 1714, Les « moulins du château » à Clisson
appartiennent à Descazeaux du Hallay. Leur affectation est uniquement farinière
et un moulin à vent dit de « Toutejoye » leur est adjoint.
Joachim Descazeaux, écuyer
seigneur du Hallay, du Gué au Voyer, la Sénéchaussière, Saint-Fulgent et
autres lieux, se retira à partir de 1717 à Paris. Sa maison était située quai des Théatins (paroisse
de Saint-Sulpice), devenu quai Malaquais. Mais il mourut en son château
du Hallay en novembre 1732. Le
château actuel a été construit après lui.
Dans son testament (10 septembre 1731) il légua à
l'abbé de Rothelin, oncle de sa femme, une grande tenture complète de
tapisserie représentant l'Histoire de
Jacob, et à Monsieur de Monthulé, conseiller au parlement, une tenture
complète représentant l'Histoire de
Scipion et Annibal. Sa veuve eut notamment deux grands bassins d’argent doré, envoyés du
Mexique par Dom Gilles Celo de la Ria (5).
Un inventaire après décès de ses biens meubles fut dressé dans sa maison
parisienne, le 30 janvier 1733. Ses trois exécuteurs testamentaires
furent : Jean-Baptiste de Monthulé, conseiller au parlement, chef du
conseil de la princesse de Conti, de René Darquistade, seigneur de La
Maillardière, au nom de Françoise Descazeaux
son épouse, et de Pierre-Charles Glot, avocat au parlement.
La veuve de Joachim Descazeaux, Marie Henriette de Briquemault se retira à
l’abbaye du Ronceray (Angers) après la mort de son mari. Après sa mort, ses
biens propres furent partagés entre Charles Armand de Rohan, prince de
Rochefort et Marie Henriette d’Orléans de Rothelin (6). Joachim Descazeaux
avait destiné son fils unique vers un office au parlement de Paris, son
ascension sociale devant se poursuivre en abandonnant le négoce suivant les
mentalités de l’époque. Joachim ne s’entendait pas avec son frère Pierre
Julien Descazeaux et recueilli ses filles Françoise et Angélique quand ce
dernier se remaria en 1669 avec Claire Gombault. N’ayant pas de neveu, et pour
garder sa maison de commerce dans son clan, il maria en 1714 l’une de ses
nièces avec un parent éloigné, René Darquistade. Et dans son testament en 1731
il fit d’eux ses légataires universels (7).
René Darquistade (1680-1754)
Ses origines et sa famille
Notre source principale sur la destinée des Darquistade aux 17e et 18e siècles à Nantes est un mémoire d’université de Cécile Hérault présenté en 2003 (7). Entre parenthèses nous indiquerons les pages d’où nous tirons nos informations. Le grand-père de René Darquistade, Pierre Darquistade, était marié avec
Madeleine Decazeaux, une sœur de Pierre Descazeaux, ce dernier père de Joachim
et Pierre Julien Descazeaux. Le père de René Darquistade, Armand René
Darquistade, était venu lui aussi de Bayonne s’installer à Nantes, se mariant
le 21 avril 1676 avec Marie Audet, dont le père, Pierre Audet était marchand et
à la fin de sa vie receveur général des décimes de Bretagne et
conseiller secrétaire du roi (page 16). Armand
René Darquistade et Marie Audet eurent une fille, Françoise, et un autre fils
Joachim. Ce dernier, né en 1688, épousa Françoise Souchay.
René Darquistade marin (1698-1713)
René Darquistade est né le 26 juillet 1680 et
mourut le 14 janvier 1754 à Nantes. Il perdit son père à l’âge de 17 ans, alors
que celui-ci avait fait faillite en 1681 dans son activité de négoce maritime. Il
remboursa les dettes de son père et commença une carrière de marin (pages 30 à
32), ayant déjà mené 3 expéditions avec son père, René Darquistade. Il
inaugura sa carrière de capitaine en 1701 à 21 ans dès sa 4e
expédition. C’est un peu tôt, n’étant pas fils de négociants, mais il était
protégé par son armateur et parent, Joachim Descazeaux.
Sa carrière au long cours s’étale
au total sur 15 années, en représentant 10 à naviguer. Il fait du cabotage vers
Cadix et surtout des expéditions au Mexique et en « mers du sud ». Là
il pratique la contrebande à l’insu des Espagnols. Cette carrière lui permettra
de se former à sa future activité de négociant (tractations secrètes, maîtrise
de l’espagnol, pots de vin). Elle lui permettra aussi de s’enrichir, non pas
tant avec son salaire de capitaine, qu’avec le droit au
« port-permis », ou droit pour les officiers d’embarquer pour leur
compte une certaine quantité de marchandises qu’ils négocient (pacotilles).
Avec la complicité de son armateur, toujours Joachim Descazeaux, il se livre à
des trafics « juteux », notamment sur les piastres volées aux
Espagnols. Ils se soustraient en partie au paiement de l’indult (droit de 6 %
sur les marchandises et métaux ramenés des mers du sud en 1709 et 1710), ainsi
qu’à l’obligation de porter les métaux précieux aux hôtels des Monnaies (pages
48 à 52). Ainsi grâce à Joachim Descazeaux et à un heureux hasard, René
Darquistade était devenu un homme riche en 1713 quand il arrêta la navigation.
En 1714 il épousa Françoise Descazeaux, nièce de Joachim
Descazeaux dans le manoir de la Foliette (Haie-Fouassière), et fille de Pierre
Julien Descazeaux, frère aîné de Joachim.
Pierre Julien Descazeaux (décédé en 1726) s’était marié deux fois, d’abord
avec Marie Olive Chenu. De son premier mariage il eut trois filles :
Marie, religieuse ursuline, Angélique, qui épousa André Boussineau, et
Françoise (1687-1769), qui épousa René Darquistade. Puis il épousa en 2e
noces le 31 décembre 1699 Claire Gombaud, dans la chapelle privée du manoir de
la Foliette (2), fille de Siméon Gombaud, écuyer, et de Gilette Pradier.
De nombreux sites
internet racontent un aspect anecdotique de la vie de marin de René Darquistade : il introduisit
une espèce de magnolia en France. Un de ses bateaux, le Saint-Michel, (mais est-ce bien lui ?) ramena un spécimen des
bords du Mississipi en 1711. Féru de botanique, il le fit planter dans les
serres de sa propriété de la Maillardière aux Sorinières (sud de Nantes). Puis
l’arbre fut mis en pleine terre et grandit pendant une vingtaine d’années,
fleurissant abondamment. En 1764 il fut identifié par le botaniste François Bonamy, « Magnolia grandiflora maillardiensis ». Et il est à
l'origine des magnolias qui ont fait la réputation du jardin des plantes de Nantes, considéré comme le premier Magnolia
grandiflora introduit en Europe.
Magnolia
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Cette histoire de Magnolia fit se
rapprocher René Darquistade avec un marin célèbre et voisin : Barrin de la
Galissonière. Militaire, qui fut gouverneur de Louisiane puis du Canada, il se passionna
tôt pour les plantes exotiques, qu’il tenta d’acclimater dans sa propriété de
la Galissonnière (Le Pallet en Loire-Atlantique). Avec le tulipier, le
liquidambar et le sassafras, il introduisit vers 1740 un nouveau clone de
magnolia qui passera à la postérité sous le nom de « Magnolia grandiflora
galissonniensis ».
Sa femme, Marie de Lauzon, était
propriétaire, par héritage de ses parents, de la seigneurie et métairie de la Richerie
(Beaurepaire) et des métairies de la Bonétrie et Petite Boucherie (Saint-Fulgent).
Elle vendit le tout en 1764 à Claude
Charles Conrart pour la somme de 27 000 livres (8). La Petite Boucherie
était tenue de la seigneurie du Puy-Greffier (Saint-Fulgent), à la charge de
payer chaque année à celle-ci 4 sols, et une redevance bien particulière. On
amenait en effet au suzerain un bouc blanc, auquel on avait attaché à ses
cornes une bourse neuve garnie de 10 sols et une gousse d’ail. Le suzerain
devait choisir le bouc ou la bourse ! (9).
René Darquistade négociant et armateur (1713-1742)
Joachim Descazeaux, son oncle par alliance, associe désormais René
Darquistade à ses affaires. Parallèlement ce dernier fait des armements de
navire pour son propre compte de 1714 à 1742. Mais il n’arme que 20
navires. Darquistade n’égale en rien les Montaudouin, Grou et Drouin (page 59).
Voyons de près les orientations de ses armements, en commençant par les moins
importants. La pêche à la morue ne représente que 5 % de ses armements dans la
période de 1714 à 1742. Elle était surtout pratiquée par les ports du Croisic,
Pornic et surtout les Sables à partir du 18e siècle. L’interlope ou
contrebande ne représente aussi que 5 % comme ci-dessus (armement au Mexique et
voyage dans les mers du sud). Le relèvement des navires coulés est une
exclusivité de Darquistade, notamment dans la baie de Vigo, port espagnol où
s’était déroulée une bataille en 1702 (page 89). Il a représenté 25 %. L’activité
de cabotage de sa compagnie a représenté 10 %. Il a pratiqué deux autres
activités, la droiture (40 %) et la traite (15 %) (page 66).
Il a armé 8 navires pour les
Antilles en trafic de droiture (pas de transbordement entre le port de
chargement et celui de déchargement), emportant à l’aller des marchandises de
peu de valeur nécessaires aux colons (nourriture, produits manufacturés,
matériaux de construction). Au retour les navires ramenaient des produits
tropicaux : sucre, indigo, cacao, coton, cuir, tabac (pages 81 et 82).
Il a pratiqué enfin le
commerce « triangulaire », ainsi appelé parce que les bateaux
quittaient les ports français avec des marchandises (fusils et pacotilles diverses)
vendues sur les côtes africaines. Sur place les capitaines achetaient des humains
captifs aux chefs locaux, qu’on allait revendre à des colons comme esclaves en Amérique du
sud et dans les Caraïbes. Avec le produit de leur vente, ils achetaient sur place des sucres et autres marchandises exotiques, vendues au
retour en Europe. On multipliait ainsi la mise par cinq en moyenne en quelques
mois, sauf incidents.
Bien sûr dans les grandes
civilisations de l’époque, y compris l’européenne, les mentalités avaient un
regard bien primitif sur les populations d’Afrique. Il était
renforcé par l’évidente supériorité technique des Européens. On sait que la
science éclaire l’objet de ses études, mais que sa lumière ne se réfléchit pas
sur elle-même. À propos de ce commerce, ceux qui savaient et ceux qui participaient
au trafic en Europe, peu nombreux, en éprouvaient néanmoins de l’embarras. Il
est significatif que les trafiquants désignaient les esclaves, leur « marchandise » entre
l’Afrique et les Antilles, par l’expression : « bois d’ébène ». Elle trahissait une gêne personnelle, transformée
en cynisme dans la relation avec autrui. On pense à d’autres situations de même
nature dans l’Histoire pour désigner l'innommable : la « solution finale » chez les nazis,
et le « quartier général »
chez les généraux des colonnes infernales en Vendée en 1794. Y-avait-il dans l’église de Saint-Fulgent un
« tronc des captifs » comme on en trouva un dans l’église de Chauché en
1780 ? C’est probable, et les dons des fidèles servaient à racheter les
esclaves capturés sur les côtes de la Méditerranée par les Arabes. Cela veut au
moins dire que l’esclavage était mal vu et connu des populations du Bocage. On
n’est pas sûr néanmoins qu’elles étaient au courant de toutes les activités
maritimes du seigneur de Saint-Fulgent. Quant à ce dernier, on peut même se demander
s’il y fit des dons. L’Église catholique, après s’être posé la question, conclu dans sa
doctrine que tous les hommes étaient des fils de Dieu sans distinction. Buffon,
dans son Histoire Naturelle
(1749-1789), professait l’égalité
des races. Plus tard Tocqueville observa qu’au XVIIIe siècle on « croyait
à la diversité des races, mais à l’unité de l’espèce humaine » (10). Néanmoins Bossuet se fit l'avocat du Code noir qui légalisa la traite des Noirs. Sans
confondre les idées dominantes des intellectuels et celles en vigueur dans
divers milieux sociaux, ce siècle parait en somme plus évolué sur la question
raciale et de l’esclavage que ceux qui l’ont suivi, et le commerce triangulaire
y était moins accepté qu’on le pense parfois.. Tout se passe comme si nos ancêtres ont toléré la pratique de l’esclavage
dans l’intérêt de l’industrie sucrière, puis ont inventé des théories racistes
pour se justifier.
Les circuits du
commerce triangulaire
|
René Darquistade ne fut pas le seul à
s’enrichir dans cette traite des Africains : les Montaudouin et les Descazeaux
aussi, parmi d’autres. Les historiens placent les Montaudouin parmi les plus
importants armateurs nantais dans la première moitié du 18e siècle,
au vu du nombre de leurs campagnes commerciales sur les mers. René II
Montaudouin, qui avait acheté la seigneurie de la Rabatelière en 1725, doit
l’essentiel de son immense fortune à la traite négrière. Ses descendants,
anoblis, sortirent de ce milieu et firent carrière dans les armes, tandis que
les descendants de ses frères, Jacques et Thomas Montaudouin, restèrent dans
l’armement maritime nantais. Cet abandon du négoce au profit des armes est
révélateur des mœurs de l’époque. Car ce n’est pas l’objet du négoce qui est
ici en cause malheureusement, mais l’activité de négoce elle-même, considérée
comme moins noble que les armes ou la rente des terres. C’est dire si l’époque
n’était pas portée à valoriser dans le royaume de France l’entreprise industrielle et commerciale, qui
allait bientôt enrichir les sociétés européennes.
Entre 1723 et 1740 les colonies françaises
reçurent 233 520 noirs embarqués par les bateaux nantais, chiffre presque
doublé si on prend la période de 1715 à 1789. Nantes représenta plus d’un tiers
de la traite française, et fut le premier port « négrier » d’Europe
(11).
Ces marchands d’esclaves firent aussi venir des hommes et des femmes à la peau noire en
France. Un édit de 1716 avait accordé le droit d’amener des « esclaves nègres » en métropole pour
servir comme domestiques ou apprendre un métier, à la condition de les déclarer
et de les renvoyer au bout d’un an, terme porté à trois ans en 1738. L’autorité
royale était réticente sur ce point. Elle craignait de favoriser le métissage
en métropole, crainte accrue par la règle appliquée par certains parlements
comme celui de Paris, de considérer la terre de France comme « privilège d’affranchissement ».
Mais les négociants résistaient aux ordonnances royales, et Nantes fut le point
d’entrer le plus important de la Bretagne dans cette importation (12). Mme
Descazeaux avait un « nègre » connu : Isidore.
Dans ce trafic de traite d’êtres humains René
Darquistade n’arma que 3 expéditions de 1719 à 1721, alors que de 1702 à 1719,
près de 150 navires ont quitté Nantes pour la traite. Il prit sa part dans la mise
en place des circuits, poussé par la hausse de la culture sucrière aux Antilles
(page 83). Au total 555 noirs ont été traités par les navires Darquistade de
1719 à 1722 (page 88). Il délaissa par la suite le trafic négrier, la droiture
était plus sûre et tout aussi rentable.
Enfin n’oublions pas que son
frère, Joachim Darquistade, fut un navigateur et explorateur français.
Capitaine du Saint-François, il
contribua à faire connaître la Terre de Feu.
Le 12 avril 1715 il découvrit et cartographia une baie à proximité du cap Horn, très propre à servir de port de refuge, lit-on dans un texte publié sur
internet.
On retrouve René Darquistade aussi dans le Bas-Poitou. Ainsi est-il parrain
d’Henriette Coutouly, fille de Pierre Coutouly et de Marie François à
Luçon le 25 septembre 1723 (vue 56). Louis Prosper Proust tient l’enfant à sa
place ce jour-là sur les fonts baptismaux. Il est aussi parrain d’Henriette
Proust, fille de Louis Prosper Proust, le 29 mars 1724 à Saint-Fulgent (vue 17).
Au baptême d’un autre fils, Pierre-Henri-Benoît
Proust le 22 octobre 1734 (vue 95), le parrain est Pierre-Henri-Benoît Darquistade, le fils de René.
Le curé précise dans l’acte de baptême que le parrain est « seigneur de ces lieux ». D’ailleurs
il porta cette qualité toute sa vie, y compris dans son contrat de mariage.
Pour conclure sur son activité de
négociant on notera qu’elle fut importante, mais moyenne, ne justifiant pas à
elle seule l’importance du personnage dans le milieu négociant nantais. Mais à
côté de l’activité de négoce de sa compagnie il pratiqua l’intéressement avec
d’autres armateurs, les invitant à placer des fonds dans l’investissement
nécessaire aux expéditions de navires. Les bénéfices étaient ensuite partagés au
prorata des sommes investies. Cela permettait de diviser les risques en
diversifiant les placements. Il semble surtout avoir investi chez d’autres
armateurs que d’avoir accepté des investissements dans sa propre compagnie
(page 73 et s.). Et il mit fin à son activité de négoce en 1742 à cause de
l’entrée en guerre de la France dans la guerre de succession d’Autriche
(1740-1748) (page 79), emportant de grands risques pour la marine marchande du
royaume de France.
Le maire de Nantes anobli
René Darquistade
avait acquis le château de la Maillardière (Sorinières au sud de Nantes) en
1722 (13) possédée auparavant par
Marie Gabard, femme de Charles de Monti. Le bâtiment fut brûlé pendant la
Révolution. Le château actuel est une bâtisse du 19e siècle. En
1728 il acquiert un 2e domaine, la Foliette (Haye-Fouassière en
Loire-Atlantique), de son beau-père, Pierre Julien Descazaux pour 45 000
livres. En 1741 il obtient les terres de la Resangle et des Aubraies
(Chevrolière près du lac de Grand lieu), cédé par son beau-frère, Pierre
François Descazeaux. Surtout il hérite en 1732 de son oncle Joachim Descazeaux :
terres de Saint-Fulgent, Haye-Gaisselin en Anjou, de Gué au Voyer à
Saint-Julien-de-Concelles (Loire-Atlantique) et Meslean (Basse-Bretagne), des
maisons à Nantes et Paris pour 244 000 livres (pages 112 et 113). Son capital
foncier est de 970 000 livres en 1740. En 1739 avec 421 livres de capitation (impôt),
il fait partie des 3 négociants les plus capités à Nantes, exæquo avec la veuve
Montaudouin et devant Luc O’Schiel, capité à 340 livres. En 1745, avec 470
livres de capitation il s’approche de l’infime fraction des 160 à 200 familles
du royaume, payant plus de 500 livres (page 118). René Darquistade possédait
aussi la seigneurie de la Poitevinière à Saint-Georges-de-Montaigu, comme en
témoigne une déclaration roturière passée devant le notaire des lieux, maître Étienne Bouron, le 29 avril 1748 par 11 propriétaires des environs (14).
René Darquistade occupe une
maison donnant sur la Fosse à Nantes. Les étages sont voués à l’habitation et
le rez-de-chaussé aux bureaux, magasins et comptoirs de vente. La partie des
étages donnant sur le quai est louée, et Darquistade habite la partie à
l’arrière de la cour donnant sur la rue de la Héronnière (page 114). C’est la
vitrine de prospérité du port de Nantes avant le début des constructions sur
l’île Feydeau. La demeure est vendue en 1735 pour 27 000 livres à Nicolas
Mercier (page 115). Devenu maire, il loge à l’hôtel de ville et dans une maison
à la Fosse non repérée. De 1741 à 1745, maire pour la 2e fois, il
réintègre l’hôtel de ville. Seulement en 1746 il habite la paroisse Saint-Laurent, quartier aristocratique près de la cathédrale. Il choisit la maison
des « Minimes » situé juste devant l’édifice religieux, à l’angle de
la place Saint Pierre et de la rue Saint Laurent, qu’il loue à l’abbé
Bourgeois, chanoine de la cathédrale (page 115). Il avait été anobli en 1743 et
il lui importait alors de délaisser le milieu des négociants de la Fosse.
Jetons de la seconde mairie de Nantes de M.
Darquistade
|
René Darquistade fut échevin de Nantes en 1718, puis maire de la ville de 1735 à 1737, puis de 1740 à 1747. Il fut aussi colonel de la
milice bourgeoise.
Il acheta une charge de secrétaire du roi, maison et couronne de France de ses
finances en 1737. En 1741 il acquiert une deuxième charge :
lieutenant de la vénerie du roi, charge purement honorifique, « qui lui
sert à renforcer sa légitimité et tenter de faire oublier une situation de
parvenu » (page 140).
Son anoblissement en 1743 le fut
par mérite, ce qui reste exceptionnel dans le milieu négociant nantais (page
142), motivé officiellement et principalement par ses expéditions de capitaine
de navires. Dans la guerre de succession d’Espagne il a contribué à faire
rentrer en France des sommes considérables. Et puis il y ses
responsabilités : au consulat, en tant que commissaire pour l’abonnement à
la capitation, et surtout ses deux mandats municipaux. Officieusement, ses relations tissées
jusqu’à la cour grâce à sa fortune, ont dû compter. Écuyer, seigneur de
la Maillardière, il portait « d’argent au chevron de
gueules, accompagné de trois trèfles de sinople
deux et un ».
Il restait encore un échelon social à
monter : se faire accepter dans les rangs de la haute aristocratie. Ce
sera à son fils de le faire. Le 26 juillet 1743, ce dernier est reçu
« conseiller du roi en sa cour de parlement et commissaire aux requêtes du
palais ». Il siège parmi les 12 conseillers de la 1e chambre
des requêtes, avec une dispense d’âge, étant âgé de 21 ans (au lieu de 25 ans
minimum) (page 148). Deux jours après, le 28 juillet 1743, Pierre Henri Benoît,
dit monsieur de Saint-Fulgent, se marie avec Louise Adélaïde Lorimer. Le père,
Antoine Charles Lorimer, est maître de la chambre aux deniers de sa majesté
entre autres. Sont notamment témoins au contrat de mariage le prince Charles de
Bourbon, comte de Charolais, Louise Élisabeth de Bourbon, veuve de Louis Armand de Bourbon, prince de Conty et
du Langon, Charles de Lorraine, grand écuyer de France (15).
Une faillite déshonorante
Des créanciers, les Bellabre,
réclament le paiement de 94 538 livres dues par René Darquistade à leur
père. Ils veulent saisir des biens et engagent un procès. Darquistade
n’obtient pas de l’assemblée des créanciers le délai de 3 ans, possible, pour
régler sa dette, car il avait 1 000 000 livres d’actifs et seulement
585 000 livres de passifs déclarés. Il est mis en faillite le 25 octobre
1748 au siège du consulat de Nantes. La cause essentielle de ses difficultés réside
dans la gestion de son patrimoine : 79,3 % en domaines fonciers, hôtels et
maisons. Il a voulu en vendre certains pour se refaire, mais la conjoncture
économique ne s’y prêtait pas. Il aurait dû placer plus d’argent en rentes
constituées, d’un rapport intéressant et régulier, faisant trop confiance à la
terre et à la pierre, et ne diversifiant pas assez ses placements (page
158).
Le 18 décembre 1752, le curé de Saint-Fulgent,
Jacques Gilbert, écrit dans son registre paroissial, qu’il a bénit la
petite cloche de l’église paroissiale, nommée Jacques, « à défaut de Henri Darquistade de Saint-Fulgent (il s’agit de Pierre Henri Benoît, fils de
René), conseiller au parlement (de
Paris), et de dame Henriette de Briquemault,
marquise de Férole, autrefois dame de cette paroisse, dont les noms sont gravés
sur ladite cloche, et qui ont refusé de la nommer, vu, disent-ils, les
circonstances où ils se trouvent » (16). René Darquistade n’est décédé
que deux ans plus tard, et on comprend qu’ils font allusion au déshonneur qui
les frappait à cause de la faillite de 1748.
René Darquistade dut abandonner
la Maillardière à ses créanciers. Il se retira avec sa femme dans le petit
domaine de la Foliette. Malade, il survit 5 ans à sa faillite. Il décéda le 14
janvier 1754 à 73,5 ans à la Foliette. Après le décès de son épouse
Françoise Descazeaux en 1769, la Foliette fut vendue à Joseph Lelong et Saint-Fulgent à Agnan Fortin.
Pierre Henri Benoît Darquistade (1722-1759)
Sans possibilité d’évolution à
cause de la faillite de son père, Pierre Henri Benoît
Darquistade demeura 16 ans dans sa fonction de conseiller à la
chambre des requêtes, jusqu’à sa mort prématurée en mai 1759 à l’âge de 37 ans
seulement. Sa femme eut la garde de leur fille unique : Élisabeth. Elle
sera mariée à Louis Élisabeth de Pardieu, colonel aux grenadiers de France
(pages 160 et 161).
Le seigneur de Saint-Fulgent
fut inhumé à Bièvres (Essonne). Dans un article décrivant en
1885 l’église de Bièvres, dans l’ancien canton de Palaiseau
(arrondissement de Versailles), l’auteur écrit la remarque suivante à propos de
l’ancien chœur et sanctuaire : « Une
grille en bois sépare ces parties de la nef. Sur ses barreaux sont fixées
quatre petites plaques de cuivre rouge, provenant de débris de cercueils
extraits des caveaux ayant existé dans cette partie de l'église ; elles portent
les inscriptions, dont l’une est la suivante » :
« Ici Repose le corps de messire Pierre Henry Benoist Darquistade de Saint-Fulgent
conseiller du roi en sa cour de parlement et
commissaire aux requêtes du palais décédé en sa maison rue du Faubourg-Saint-Honoré paroisse
de la Madeleine de la Ville-L’Évêque le 20 mai 1759 âgé de trente-sept ans
passé et transporté en la paroisse de Bièvres le Châtel le 21 du dit mai
Resquiescat in pace » (17).
Château des Roches à Bièvres
|
Ainsi nous est donnée sa
dernière adresse parisienne dans le faubourg-Saint-Honoré, faisant alors partie
de la paroisse de la Ville-l'Évêque
dans le futur 8e arrondissement de Paris. Elle a disparu comme son
ancienne église paroissiale de la Madeleine, démolie en 1764. On apprend que
son cercueil a aussi disparu pour des raisons ignorées, et seule une plaque a
été récupérée pour perpétuer sa mémoire. On suppose que son inhumation à
Bièvres le rapprochait d’une résidence de campagne, que peut-être il y
possédait. Le cimetière de l’église de La-Ville-l’Évêque ne datait que de 1690 et il
fut remplacé par un marché à l’époque du décès du seigneur de Saint-Fulgent
(18). Ce contexte contribue sans doute à expliquer l’inhumation à Bièvres.
Les Guyet-Desfontaines et Amaury-Duval, amis très proches des Bertin,
propriétaires du Journal des Débats,
ont fréquenté assidûment ceux-ci dans leur résidence de Bièvres au milieu du 19e
siècle. Propriétaires alors de Linières situé à proximité de Saint-Fulgent
où ils y possédaient des métairies, il
est presque certain qu’ils ont connu l’existence de cette plaque. Ils en
savaient certainement plus que nous sur ses mystères. Mais ils n’en ont fait
aucune allusion dans les courriers que nous avons pu lire. Cette plaque
est-elle toujours en place 130 ans après ?
La publication de notre
article en janvier 2016 a suscité les recherches d’un internaute voisin des
lieux dans la région parisienne, Vendéen originaire des Essarts. Nous ajoutons
ici les informations qu’il nous a données (19).
Les plaques de cuivre
ne sont plus visibles dans l’église de Bièvres probablement parce que la grille
qui séparait le chœur de la nef a été enlevée depuis longtemps. Pierre Henri Benoît
Darquistade avait épousé le 28 juillet 1743 dans la paroisse Saint-Sulpice
à Paris Louise Adélaïde Lorimier (1728-1829)
fille d'Antoine Charles Lorimier, secrétaire du roi de la grande chancellerie
de France, intendant et contrôleur général des livrées du roi. Ce beau-père de
Darquistade possédait à Bièvres le château du Petit Bièvres encore appelé
« pavillon Marie Antoinette ». Ce pavillon existe toujours, au n° 5
rue du Petit Bièvres, près de la mairie et de l’église. C’est très
vraisemblablement en raison de cette résidence de Bièvres appartenant à sa
belle-famille que Darquistade y a été enterré.
Château du Petit Bièvres
|
Le beau-frère de
Darquistade s’appelait Claude Christophe Lorimier de Chamilly, né en 1732. Il
était premier valet de chambre de Louis XVI et brava les plus grands
dangers le 10 août 1792 pour pénétrer aux Tuileries auprès de la personne
du Roi. Serviteur loyal, il fut emprisonné à la Force mais échappa aux
massacres de Septembre. Arrêté une seconde fois le 9 février 1794, il fut
enfermé dans la prison du Luxembourg, et périt sur l'échafaud le 23 juin à
l'âge de soixante-deux ans.
L’acte d’inhumation de
Pierre Henri Benoît Darquistade est consultable en ligne aux Archives
Départementales de l’Essonne dans le registre paroissial de Bièvres, années
1748-1760, vue 161 : « Lundi vingt et unième de mai 1759 a été apporté
dans cette église par la permission de monseigneur l'archevêque de Paris le
corps de messire Pierre Henry Benoît Darquistade de Saint-Fulgent conseiller du Roi en
sa cour du Parlement et commissaire aux requêtes du Palais, époux de Louise
Adélaïde de Lorimier décédé de hier en la paroisse de Sainte-Marie-Magdelaine
de la Ville-l'Évêque à Paris âgé de trente-sept ans ou environ, au transport
duquel ont assisté messire Claude Christophe Lorimier de Chamilly intendant et contrôleur
général des écuries et livrées du Roy et messire Philippe Hilaire de
Beaufort écuyer avocat au Parlement, témoins qui ont signé ».
Pendant que la seigneurie de Saint-Fulgent était aux mains d’un commissaire
des saisies réelles à Rennes, les créanciers négligeaient les dépenses
d’entretien. Le régisseur et receveur des recettes sur place, Mathurin Thoumazeau,
fit face à la situation, pris entre les exigences des créanciers et les
obligations du propriétaire. C’est ainsi qu’il reçut le 10 juin 1754 une
sommation par sergent royal (huissier) de faire faire les réparations
convenables aux deux moulins à eau et aux bâtiments de la Pesotière, installés
sur le ruisseau de la Grande Maine dans la paroisse de Saint-Fulgent, par
Mathurin Guicheteau, meunier et fermier des moulins. On a le procès-verbal de
la visite des lieux et le devis initial des réparations, qui se monte à 700
livres (20).
Ce sont les créanciers des parents de Pierre Henri Benoît
Darquistade qui vendirent la
seigneurie de Saint-Fulgent dix années après ce décès, en
1769, à Agnan Fortin, un autre Nantais pour la somme de 157 000 livres (21).
Rappelons qu’elle avait été achetée en 1722 pour un montant de 122 700
livres, et qu’elle fut estimée lors de la faillite de 1748 130 000 livres
(page 187).
De son vivant Pierre Henri Benoît Darquistade tenait le petit
fief Ruffin à Saint-Fulgent de la seigneurie du Puy-Greffier. Il y eut
rectification ensuite, le fief Ruffin rendant hommage à la seigneurie de la
Thibaudière, appartenant à la seigneurie de Saint-Fulgent et mouvante du
marquisat de Montaigu. Il était situé
proche du village de Manerier (9).
Agnan Fortin (1727-1798)
Ses origines et sa vie d’officier
Il était fils de Louis Fortin, né vers 1686 en Indre-et-Loire, et
de Marie Anne Jaroffroy. Ils s’étaient
mariés le 12 septembre 1719 à la Croix-des-Bouquets, dans l’île de Saint-Domingue. Ils exploitèrent la
sucrerie du Petit Bois, sise au quartier du Cul-de-Sac, paroisse Notre-Dame-du-Rosaire de la Croix-des-Bouquets. Ils rentrèrent à Nantes dès 1745 et acquirent
en 1746 la propriété de Bellanton (à Thouaré, sur la rive droite de la Loire à 6 km en amont de Nantes) et en
prirent le nom. Nous devons ces informations et celles qui suivent au comte de
Grimoüard, qui a publié un article dans la revue « Généalogie et Histoire de la Caraïbe », no 240 en octobre
2010 : « Les Fortin de Saint-Fulgent et de Bellaton ».
Croix-des-Bouquets en 1881
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Agnan Fortin est né le 14
septembre 1727 à la Croix-des-Bouquets à Saint-Domingue (actuellement Haïti),
où il passa son enfance et sa jeunesse. Ses parents y exploitaient la sucrerie
du Cul-de-Sac, comprenant de nombreux esclaves. Dès 1752, il sert dans les
mousquetaires gris (maison du Roi). Son acte de mariage en 1768 le dit « capitaine de cavalerie, chevalier de Saint
Louis » et domicilié paroisse Saint-Nicolas à Nantes.
Le 19 juillet 1768 en effet, il
épouse dans la chapelle des capucins à Nantes Suzanne Élisabeth Marie Lieutaud
de Troisville, fille de Jean Baptiste Lieutaud de Troisville, ancien négociant,
et de Suzanne Élisabeth Guitton, qui possédaient une sucrerie à Saint-Domingue.
L’implantation à Saint-Fulgent
L’année d’après Agnan Fortin
achète la seigneurie de Saint-Fulgent et une charge de secrétaire du roi.
Grâce aux revenus des plantations
de Saint-Domingue, il fait d’importants travaux dans le château de Saint-Fulgent
et prodigue des dons à l’église de la paroisse. Il a fait démolir l’ancien
château. Les nouvelles constructions comprennent en 1774 six corps de bâtiments
se joignant (granges, écuries, remises, toits, métairie et bas office), bâtis
dans le jardin et la cour de l’ancien château. Son futur « hôtel ou nouveau château » est à
reconstruire à cette date en prenant une partie de l’ancien jardin et une autre
partie dans l’ancien parc. Le reste du parc sera transformé pour y créer les
nouveaux jardins, vergers, cour et basse-cour. Le tout occupe une surface de 36
boisselées (4,3 ha) (22).
Il conserve toujours un droit de
passage par un jardin et une cour d’un particulier pour aller directement
de son château à l’église ou dans sa « ville
de Saint-Fulgent, étant à pied avec notre compagnie, et
domestiques familiers étant avec nous, et ce à heures dues, conformément à
l’arrentement qui a été fait de ladite maison cour et jardin par les anciens
seigneurs à Dominique de Loche sieur de la Touche, laquelle maison était
appelée la maison de la Tour ». Celle-ci
appartient en 1774 à Jean Leloup sieur du Parc, chirurgien (22).
Il arrenta le four banal du bourg
de Saint-Fulgent. L’acte fut passé devant Frappier et Boisson, notaires des
lieux, le 15 janvier 1771 (23). Il avait donné pouvoir d’agir en son nom à son
procureur fiscal sur place, Mathurin Thoumazeau. Les acquéreurs du four, avec
sa maison de trois pièces de rez de chaussée et un jardin, sont pour moitié
chacun Marianne Pairaudeau, veuve de François Tricoire, et François Morlière,
marchand, tous deux demeurant dans le bourg de Saint-Fulgent. Le four et ses
annexes, occupant « 3 boisselées à
semer lin », est situé dans les préclôtures du château, touchant la
route de Nantes à la Rochelle et la tour prison. D’ailleurs les acquéreurs
s’engagèrent à laisser le passage pour accéder à cette prison.
Le nouveau seigneur de Saint-Fulgent
se réserve pour le principe le droit de banalité et la faculté de contraindre
les habitants de Saint-Fulgent, qui y sont sujets, à l’usage du four. Les
preneurs ne pourront donc pas faire usage de ce droit, et il est prévu qu’ils
laissent ceux qui le souhaitent, faire construire des fours dans leurs maisons,
pour un usage familial. Conformément au droit féodal de la propriété, il est
convenu que le four sera tenu roturièrement sous l’hommage du seigneur de Saint-Fulgent
au marquisat de Montaigu, en même temps que la partie de Saint-Fulgent en
dépendant. On sait que la plus grande partie dépendait de la seigneurie de
Tiffauges. Mais le cens et devoir noble annuel de 5 sols et 2 chapons dû par le
seigneur de Saint-Fulgent, sera pris en charge par les preneurs du four. Cette
présentation juridique de l’acte d’arrentement montre bien la volonté du
seigneur de Saint-Fulgent de ne plus appliquer ce droit de banalité, et pour cela, il le garda pour lui.
Louis Toffoli :
Le four à pain
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Il faut savoir que ce droit de
banalité seigneuriale, né avec le millénaire, a eu du mal a perduré dans la
contrée à cause de la dispersion des habitants dans la campagne. C’était une
obligation réservée aux habitants des agglomérations comme un bourg. Dans les
villages et les grosses métairies il existait souvent une boulangerie et un
four à cuire le pain, dénués de tout droit de banalité. Celui-ci fut aboli le
17 juillet 1793.
La rente foncière, annuelle et
perpétuelle fut fixée à 24 boisseaux de seigle, quitte des impôts royaux nés et
à naître. Elle devait être versée à la fête du 15 août, et les 24 boisseaux
étaient à la mesure du minage de Saint-Fulgent, égale à celle des Herbiers. Il semble que cette dernière information était
valable pour toute l’histoire de cette seigneurie (24). Très proche de la valeur
du minage des Essarts, ces 24 boisseaux correspondaient à 3,5 quintaux environ.
Au moment de cet acte en 1771, comme
dans l’acte suivant en 1773, Agnan Fortin habite à la Fosse à Nantes. À partir
de 1775, il a déménagé dans un hôtel de l'Île Feydeau à Nantes. Quand en 1790
il signe un pouvoir pour Jean Baudry, son garde-chasse et régisseur à Saint-Fulgent,
il indique résider dans la paroisse Saint-Clément à Nantes (25).
Le 22 décembre 1773, Agnan Fortin
vendit par arrentement une métairie d’une vingtaine d’hectares à la Chaunière
(Saint-Fulgent) à quatre voisins ensemble. Le montant de la rente annuelle et
perpétuelle payée par ces derniers est de « 50 boisseaux de seigle loyal
et marchand, mesure du minage de Saint-Fulgent, net de toutes impositions
royales ». Cela devait représenter une somme de près de 70 livres par an,
bien faible pour une telle surface. On soupçonne une situation dégradée, et il
est assez probable que les terres furent ensuite réparties entre les
acquéreurs : 3 bordiers et un meunier. Agnan Fortin a gardé à titre de
devoir noble et féodal, les menus suffrages apportés par l’ancien
fermier : 18 livres de beurre, 12 poulets, 6 chapons et 5 sols en argent.
Ces droits s’ajoutèrent à ceux dus sur le village et tènement de la Chaunière
aux seigneurs de Saint-Fulgent et de la Thibaudière, notamment le terrage sur
une partie des domaines arrentés (26).
Les chances et malchances de la Révolution
En 1791, habitant toujours dans
la paroisse Saint-Clément (27), Agnan Fortin acquiert l’essentiel des biens
nationaux de Saint-Fulgent confisqués à l’Église, renchérissant sur Simon
Charles Guyet (Voir notre article publié sur ce site en avril 2013 : Simon Charles Guyet à Saint-Fulgent (1733-1793)).
Son château de Saint-Fulgent fut
incendié par les révolutionnaires en 1793, et sa fortune connut des vents
contraires à cause de la révolte des esclaves en août 1791 à Saint-Domingue, et
de l'interruption des relations maritimes avec l'île à cause des Anglais.
De ses huit enfants, quatre lui
survivront. Son fils aîné émigra dans le camp royaliste, et le père dut négocier
pour conserver la terre de Saint-Fulgent dans l’héritage laissé à ses enfants après sa mort à Paris en 1798. Pour plus
de détails sur ses achats de biens nationaux dans la contrée, voir l’article publié sur ce site en mai 2017 : La vente des biens des émigrés à Saint-André-Goule-d’Oie.
Son fils aîné, Guy Auguste Fortin, hérita de Saint-Fulgent. Il eut une carrière peu reluisante de
sous-préfet sous Napoléon, laissant le château de Saint-Fulgent à l’abandon, sommairement retapé après la
guerre de Vendée.
En 1804 ses biens à Saint-André sont les métairies de la Boutinière et de
la Chevaleraye, achetées par son père en 1789 à Perrine Bruneau, veuve
d’Abraham de Tinguy. Il possédait aussi une rente de
16 boisseaux de froment à la Gandouinière. À Saint-Fulgent il possède les métairies de la Coussaie, de Lérandière, de la Courpière,
de la Haute Thibaudière, de la Basse Thibaudière, deux métairies à
l’Oisellière, le Plessis Richard, le Doullay et la borderie et tuilerie de
Boizard.
Déjà nous sommes dans une autre époque, celle du 19e siècle,
et il est temps de revenir en arrière pour voir comment ces nouveaux seigneurs
de Saint-Fulgent se sont
comportés dans la querelle que leurs prédécesseurs ont entretenue, à propos de
leurs droits seigneuriaux sur la Boutinière, la Chevaleraye et Javelière.
À suivre.
(1) J. Dehergne, Le
Bas-Poitou à la veille de la Révolution, CNRS, 1963, page 156, Archives de Vendée :
BIB 1224.
(3) Jean François Belhoste, Les Forges du pays de Chateaubriant, 1984, page 62.
(4) Nicole Dufournaud et
Bernard Michon, Les femmes et le
commerce maritime à Nantes (1660-1740), un rôle largement méconnu, Open
édition publié en 2006.
(5) Transaction du 12-11-1733
entre René Darquistade et l’abbé de Rothelin sur les droits de Henriette de
Briquemault, veuve de Joachim Descazaux, Archives départementales de
Loire-Atlantique, famille Darquistade : 2 E/735.
(6) Aimé de Soland, Bulletin historique et
monumental de l'Anjou, Angers, 1855, volume 3,
page 104.
(7) Cécile Herault, Heurs et malheurs d’une famille de
négociantes nantaise d’origine basque, les Darquistade aux 17e et 18e
siècles, Archives départementales de Loire-Atlantique, mémoire de maîtrise,
université de Nantes, UFR Histoire, 2003, pages 54 à 56.
(8) Ventes du 20-8-1764 de la
Richerie, Bonnetrie et Petite Boucherie (Saint-Fulgent), Archives de la Vendée,
notaires de Saint-Fulgent, Thoumazeau : 3 E 30/3.
(9) 150 J/G 40, extraits et notes sur la vente à Crespeau de 1559 et sur l’aveu de Saint-Fulgent en 1604 à Languiller. Voir aussi : Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 13, aveu du 23-6-1774 de Saint-Fulgent (Agnan Fortin) à la vicomté de Tiffauges (A. L. Jousseaume de la Bretesche), transcrit par Paul Boisson, pages 22, 18.
(10) Lettre d’Alexis de Tocqueville à Arthur Gobineau du 15 mai 1852. Citée par A. Arendt dans Les origines du totalitarisme, Quarto Gallimard, 2020, page 440.
(11) Armel de Wismes, Nantes et le temps des négriers, Édition France-Empire, 1e édition en 1983.
(12) Dominique Le Page, Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, Dictionnaire des gens de couleur dans la France moderne, mis en ligne le 30 juin 2016.
(10) Lettre d’Alexis de Tocqueville à Arthur Gobineau du 15 mai 1852. Citée par A. Arendt dans Les origines du totalitarisme, Quarto Gallimard, 2020, page 440.
(11) Armel de Wismes, Nantes et le temps des négriers, Édition France-Empire, 1e édition en 1983.
(12) Dominique Le Page, Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, Dictionnaire des gens de couleur dans la France moderne, mis en ligne le 30 juin 2016.
(13) M. Ernest de Cornulier, Essai sur le dictionnaire des terres et des seigneuries comprises
dans l’ancien comté nantais.
(14) Archives de Vendée,
notaires de Saint-Georges-de-Montaigu, étude A Bouron, déclaration roturière de 11
teneurs à René Darquistade à cause de la Poitevinière (vues 82 à 106).
(15) Contrat de mariage de M. de Saint-Fulgent du 28 juillet 1743,
Archives départementales de Loire-Atlantique, famille Darquistade : 2
E/735.
(16)http://recherche archives.vendee.fr/data/files/ad85.ligeo/pdf/FRAD085_4NUM220/4Num220_1899_3/4Num220_1899_3_0306.pdf
(17) « notice sur la commune de Bièvres » par M. F.
Martin, Revue de la commission des antiquités et des arts du département de
Seine-et-Oise, 1885, page
99.
(18) Philippe Ariès, L’homme devant la mort, Seuil, 1977, page 314.
(19) Mail de J. P. Guibert à
l’auteur de l’article du 22-02-2016.
(20) Estimation du 17-6-1754 des
travaux sur les moulins de la Pesotière (St Fulgent), Archives de Vendée,
notaires de Saint-Fulgent, Thoumazeau : 3 E 30/114.
(21) Vente du 11-10-1769 de la terre de Saint-Fulgent par la direction des
créanciers Darquistade à M. Fortin, Archives du diocèse de Luçon, fonds de
l’abbé boisson : 7 Z 108, Fortin et Rezeau.
(22) Archives historiques du
diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 13, aveu du 23-6-1774 de Saint-Fulgent (Agnan Fortin) à la vicomté de Tiffauges (A. L. Jousseaume
de la Bretesche), transcrit par Paul Boisson, pages 4 et 63. .
(23) Archives de Vendée, notaires
de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/6,
arrentement du 15-1-1771 du four banal de Saint-Fulgent.
(24) Minute du notaire Frappier du
15 avril 1771, acte d’accensement de l’emplacement de l’ancien châtel, Archives d'Amblard de Guerry : classeur prix et mesures.
(25) Frappier : 3 E 30/13,
pourvoir du 6-2-1790 donné par Agnan Fortin à son garde-chasse.
(26) Arrentement du 22-12-1773
d’une métairie à la Chaunière par Fortin, Archives de Vendée, notaires de
Saint-Fulgent, Thoumazeau : 3 E 30/121.
(27)
Frappier : 3 E 30/12, vente du
11-11-1789 des métairies de la Boutinière et la Chevaleraye par P. Bruneau
à A. Fortin.
Emmanuel
François, tous droits réservés
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