À la page 158 de mon livre, Les châtelains de Linières à Saint-André-Goule-d’Oie, je cite le nom de tous les premiers fermiers et domestiques habitant Linières. C’était en 1846, date du premier recensement nominatif par villages à Chauché. C’est ainsi que nous rencontrons la famille Maindron, avec l’aïeul, Pierre, âgé de 80 ans. Il mourra à Linières quatre ans plus tard.
Il
est indispensable de revenir sur cet homme à nouveau. De nouvelles informations
ont été découvertes à son sujet, depuis la deuxième version de mon article en
juin 2010. D’abord le livre de René Valette : « Une poignée de héros » (1902), disponible aux Archives de
Vendée dans le fonds du comte de Chabot. De même, les publications de la
Société d’Émulation de la Vendée, disponible aux Archives de Vendée, donnent
des comptes rendus intéressants sur les comices agricoles de cette époque.
Enfin, l’étude des lettres à ses électeurs de Guyet-Desfontaines (Bibliothèque
Nationale) nous a permis de mieux comprendre ses opinions politiques. C’est
pourquoi nous reprenons notre article dans une dernière version, plus complète,
remplaçant la précédente de janvier 2011.
Pierre Maindron fut capitaine dans l’armée de Charette et c’est à ce titre que la postérité a gardé son souvenir. De plus, ayant été un habitant de Linières, l’histoire du domaine ne pouvait que s’intéresser au personnage.
Capitaine dans l’armée de Charette
Il
était né à la Bleure de Chauché à l’époque, le 24 septembre 1766 (vue 49). Ce
village a été rattaché à la Rabatelière dans les années 1970 (1), et il y a une
plaque sur la maison de sa naissance.
Ses
parents, Jean Maindron et Jeanne Drapeau, étaient devenus métayers à la Bleure
le 23 avril 1760, venant de la Roche Mauvin (2). Ils s’étaient mariés en 1751.
Jean Maindron arrentera quelques petits biens situés à Doullay (Saint-Fulgent),
lui venant de son père Pierre Maindron, en 1774, moyennant une rente foncière
annuelle et perpétuelle de 12 livres, à laquelle s’est ajoutée la somme de 48
livres qu’il a reçue comptant (3).
Remarqué,
dit-on, pour son intelligence, Pierre Maindron était cocher au château quand la
guerre de 1793 se déclencha. L’historien Valette est peut-être trop précis sur
ce point, car dans les livres de comptes du château de la Rabatelière, ce
détail n’est pas confirmé (4). La réalité doit être un peu différente. Au début
de la guerre, on lui aurait demandé d’aller cacher ses chevaux dans les marais
de Machecoul, demeure de René Thomas Montaudouin, pour les soustraire aux
réquisitions.
Thérèse
Montaudouin, cohéritière de la Rabatelière par son père, avait épousé en 1780 dans l'église de Sainte-Croix de Nantes, René de
Martel, baron de Rié. Ce dernier décéda en 1785 à l’âge de 32 ans, laissant une
fille unique, qui mourut peu de temps après lui. La jeune veuve ne se remaria
pas et resta à Nantes, le temps de la Révolution, dans son hôtel particulier de
la place de la Liberté (actuellement place Foch).
Pierre Maindron fit partie des jeunes du canton de Saint-Fulgent qui suivirent Charles Aimé de Royrand dans le premier combat important du centre de la Vendée à la Guérinière en mars 1793. C’est alors qu’il alla récupérer l’un des chevaux de Mme de Martel à Machecoul, Robine, c’était son nom. Il semble que ce soit Baulmer probablement, le régisseur des Montaudouin pour leurs propriétés du marais, qui lui fournit la jument « Robine », selon l’abbé Boisson (5). Il fit alors partie de la cavalerie vendéenne.
Il ne voulut pas traverser la Loire en octobre 1793 pour suivre l’armée vendéenne et il alla rejoindre Charette qui en fit un de ses capitaines et un de ses aides de camp. « Toutes les missions qui demandaient intelligence, audace et célérité, Maindron en était chargé par Charette. S’agissait-il de rappeler sous les drapeaux six ou sept paroisses pour un cas pressant, pendant une seule nuit, Maindron à cheval parcourait le pays, assignait les rendez-vous, et aux premières lueurs de l’aurore il était de retour au quartier général. » (6).
Le 13 octobre 1794 il fait partie de la division royale de Montaigu, commandée alors par Pierre Dejean, ainsi que le montre sa signature dans un acte de baptême à la Copechagnière (vue 2 du registre clandestin numérisé), avec d’autres officiers et soldats. Dans une liste des officiers de la Vendée militaire publiée en 1887, on relève son nom ainsi : « Maindron, capitaine de Charette, 1793 à 1796 à Chauché » (7). Alors que Charles Henri de Sapinaud avait remplacé le général de Royrand après 1793 dans l’armée du Centre. Un de ses faits d’armes mémorable s’est déroulé au logis de la Boutarlière à Chauché. Mais il est utile d’abord d’en décrire le contexte en reprenant les explications de l’historien G. Lenotre (8).
L’affaire de la Boutarlière en février 1796
Depuis le traité de la Jaunaye, conclu entre les républicains et Charette le 17 février 1795, une paix relative régnait en Vendée, rompue ensuite de part et d’autre pour promesses non tenues. Le général républicain Hoche veut capturer Charette en ce début d’année 1796 et y parviendra le 23 mars 1796 dans les bois de la Chabotterie. Mais entre-temps des contacts existaient entre les ennemis pour tenter l’arrêt des combats.
C’est
ainsi que Hoche a fait parvenir un ultimatum pour la reddition de Charette à
son subordonné, le général Gratien, le 12 février 1796. Ce dernier envoie alors
un message au curé de la Rabatelière, qui servait d’intermédiaire, pour faire
parvenir ce message à Charette. C’est un paysan que le curé envoie contacter
Charette personnellement. Mais le général républicain Travot, au courant de
rien, apprend le 15 février au matin que Charette a couché à la Boutarlière (Chauché). En
y arrivant, ses soldats aperçoivent le paysan messager, le tuent et découvrent
sur le cadavre le message du général Gratien. Embarrassé, Travot encercle la
Boutarlière et voit Charette en sortir avec sa troupe d’une centaine de
cavaliers et cinquante fantassins ; il les laisse passer sans attaquer,
renvoie à Gratien la lettre qu’il vient de découvrir et s’installe dans la
ferme de la Boutarlière évacuée par les soldats vendéens. C’est donc ce matin
du 15 février que se place l’action de Pierre Maindron, telle qu’elle est
racontée dans un article de la revue du Souvenir Vendéen (9).
« Charette
avait dû s’enfuir précipitamment du logis dans la nuit du 14 au 15 février
1796, pour échapper à une patrouille républicaine de Travot. Y ayant oublié son
portefeuille sur la cheminée, contenant des papiers importants, Pierre Maindron
réussit à le récupérer en fonçant, sabre au clair, contre un groupe de soldats
voulant l’empêcher de sortir du logis.»
Dans la revue de l’association du Souvenir Vendéen, François Chatry retrace la journée de l’association du dimanche 10 septembre 2000 dans la région, consacrée à honorer la mémoire de Pierre Maindron (1766-1850) :
- Inauguration de la plaque fixée sur le mur de clôture à l’entrée du château de la Rabatelière, en l’honneur de Pierre Maindron. On y notait la présence de Gabriel Maindron, un de ses descendants, qui a montré le sabre de son aïeul, un cadeau de Charette, dit-on. Ou plutôt une récompense attribuée à la Restauration (10).
- Visite de la Boutarlière où Pierre Maindron a réalisé son glorieux fait d’armes,
- Visite de Linière où il est mort, après un arrêt dans l’église de Saint-André pour voir la Croix de Charette. Enfin, repas chez Debien.
Revenons
au récit de René Valette : « Maindron
avait dans sa monture un précieux auxiliaire. C’était une bête de taille,
possédant beaucoup de sang et sautant avec aisance les plus hauts obstacles.
Dans un combat, Maindron aidé de Robine était capable des plus incroyables
prodiges. On le voyait partout à la fois, le sabre en l’air, frappant d’estoc
et de taille, et toujours insaisissable pour ses ennemis. Cerné, un jour, par
des hussards, il va être très certainement massacré. Il n’en est rien. Poussant
Robine à toute vitesse, il se fait jour à travers les rangs ennemis, et une
fois encore échappe au danger.
Robine fit toute la grande guerre sous le capitaine Maindron. Et ni l’un ni l’autre ne reçurent la moindre blessure. La vaillante bête mourut, longtemps après la guerre, à la ferme de la Fesselière, dépendant également de la belle terre de la Rabatelière. Elle était âgée de 30 ans. Sa noble maîtresse avait voulu lui accorder tous les privilèges des Invalides. »
Au service de la châtelaine de la Rabatelière et du roi, maire de Chauché (1796-1830)
Pierre
Maindron se maria en 1798 avec Jeanne Cauneau. Leur union fut bénie dans une grange
du village de la Maigrière, de Saint-André-Goule-d’Oie, au pied d’un autel
improvisé, par l’abbé Brillaud, vicaire de Saint-Fulgent, qui se cachait toujours
dans les environs avec le curé Allain de Saint-André (11).
Il
vécut à la Chapelle de Chauché dans la propriété de sa femme après la guerre.
Dans le même temps il continuait à s’occuper des affaires de Mme de Martel, René
Thomas Montaudouin étant mort en octobre 1802. Celui-ci
avait été radié de la liste des émigrés le 22 novembre 1801. Ses deux enfants
survivants sont morts, l’un le 25 février 1791 (Françoise, 2 ans), l’autre le
10 mars suivant (Thomas, 6 ans). Et sa femme mourra le 10 mai 1802 (12). Ainsi voit-on Pierre Maindron représenter la seule
châtelaine de la Rabatelière désormais dans un acte de transaction devant le
notaire de Saint-Cécile pour l’extinction d’une rente le 19 décembre 1805 (13).
Il fait de même dans un acte d’échange devant le notaire de Chavagnes de lots
fonciers à la Benetière le 24 décembre 1812 (14). En 1806 Sorin, le fondé de
pouvoir de la châtelaine écrit à cette dernière : « Il faudra que Maindron aille chez le juge de paix des Essarts et lui
remettra les projets de citations ci-joint, et le priera de s’y conformer.
Il s’assurera du jour où il faudra comparaître,
afin qu’il s’y trouve. Il emportera avec lui les procurations » (15).
Dès
1802 il déclare occuper le poste de régisseur au château de la Rabatelière dans
la déclaration à l’état-civil de la naissance de son fils, Thomas René Marie, à
la date du 25 floréal an 10 en mairie de Chauché (vue 20). Il déclare sa
demeure à la Chapelle de Chauché. Le plus intéressant est de consulter le
registre paroissial clandestin de Chauché pour le baptême du même fils, à la
date du 1e mai 1802 (vue 18). Le parrain est « « messire René Thomas de Montaudouin, et la
marraine est Thérèse de Martel », frère et sœur. Ils sont absents à la
cérémonie et représentés par un oncle et une tante du bébé. De retour
d’émigration et ruiné, la femme de René Thomas de Montaudouin venait de mourir
le 20 floréal précédent. Lui-même mourra à Nantes cinq mois après (16).
Pierre
Maindron et Jeanne Cauneau eurent 10 enfants, dont 4 morts très jeunes et un
mort à l’âge de 16 ans. On voit Pierre Maindron faire un prêt à un de ses
neveux demeurant à la Bichonnière (Chauché), Pierre Cauneau (1783-1830),
meunier. Ce dernier avait été tiré au sort pour servir dans l’armée active,
c’est-à-dire à cette époque devenir soldat de Napoléon. Comme cela était alors
possible, il se fit remplacer par un conscrit moyennant finance. Il versa 700
francs au conscrit à Fontenay, après que l’incorporation de ce dernier fut
acceptée, en mars 1804. Pierre Maindron accompagnait son neveu à Fontenay, et
c’est lui qui avança l’argent. L’oncle et le neveu convinrent ensuite devant le
notaire de Chavagnes d’un prêt sur 4 ans avec 7 % d’intérêts (17). Pierre
Cauneau se maria deux mois plus tard avec Jeanne Perrine Cailleteau, le 21 mai
1804 à Chauché (vue 50). Il était le fils de Louis Cauneau (1759-1801), frère
de Jeanne (1775-1849), l’épouse de Pierre Maindron (18).
Le neveu Pierre Cauneau avait un frère, Jacques (qui épousa Jeanne Roy des Landes Jarry à Chauché). Celui-ci agressa verbalement dans un cabaret de Chauché vers la fin 1790 le capitaine des gardes nationaux de Chauché, François Bossard. Puis il l’accusa en juin 1791 d’une tentative d’assassinat sur sa personne au retour d’une foire des Essarts, ce qui conduisit François Bossard en prison à la Roche-sur-Yon. Ce dernier en sortit disculpé au bout de quelques mois, et les témoignages figurant dans son dossier montrent clairement la fausseté des accusations portées contre lui (19). Or il se trouve que ce François Bossard était un cousin de Jeanne Perrine Cailleteau, la future belle-sœur de l’accusateur (2e épouse du frère Pierre Cauneau). Jacques Cailleteau (père de Jeanne Perrine), était le frère de Marie Anne Cailleteau qui avait épousé René Bossard (père de François). Ces cousins se divisèrent profondément pendant la guerre de Vendée, et même entre frères au sein des Cailleteau, dont l’un fut maire de Chauché dans le camp des révolutionnaires.
Pierre
Maindron continua plus tard cette fonction de régisseur au château de la
Rabatelière. En 1820 il habitait toujours la Chapelle, étant devenu maire de
Chauché (20). Le 4 vendémiaire an 14 (26-9-1805) il renouvela le bail d’une
métairie lui appartenant (ou venant de sa femme) à la Chapelle. Les métayers
sortants étaient les Charrieaux, et les entrants étaient la communauté de la veuve
Piveteau, son gendre Louis Begaud et un autre jeune parent, Pierre Piveteau,
tous venus de la Télachère (Chavagnes). Le bail était à partage des fruits à
moitié entre le bailleur et les preneurs, évalué pour les droits
d’enregistrement à 450 F de revenus annuels (21). À cette date il est difficile de
déduire la surface du bien loué de ce montant. En principe on était sur une
petite métairie, mais était-elle en cours de réhabilitation après les ruines de
la Guerre de Vendée ? Auquel cas le prix en tenait compte comme on en a
des exemples à cette époque. Ce bail signifie-t-il que ses fonctions
auprès de la châtelaine de la Rabatelière l’occupaient à plein temps, préférant
louer sa métairie ? On ne sait pas répondre. Ce bail, prévu pour durer 7
années de 1806 à 1813, s’interrompit par accord amiable au bout de 3 ans (22).
Le
16 juin 1807 Pierre Maindron achète pour 1 200 F 4 petites pièces de terre et
un toit à bestiaux à la Bichonnière, plus au Bouchollet (les deux à Chauché),
une petite maison, un toit à bestiaux et deux planches de jardin. Aux mêmes
vendeurs, les héritiers Piveteau, il achète une rente de 15 F par an moyennant
200 F (23). On n’a pas là de fortes valeurs, mais un fait significatif d’un
homme qui amasse des biens. Et 1810 il achète la moitié d’une borderie
pour 600 F payés comptant à la Bichonnière de Chauché à René Caillé et Jeanne
Mesnard sa femme (24). Autre fait significatif, il est propriétaire en
1808 des bestiaux peuplant une borderie à la Chapelle occupée par sa mère
(Jeanne Drapeau), son frère (François Maindron époux de Jeanne Aulneau) et sa
sœur (Jacquette Maindron). Pour fixer les droits d’enregistrement ils
ont été estimés à 790 F (25).
Après
la Révolution, Mme de Martel racheta l'église, la cure, et ce
qui leur appartenait avant la guerre, et elle fonda une école de filles avec
une rente pour l'entretien des religieuses institutrices. Après sa mort en 1827,
la terre de la Rabatelière fut acquise l’année d’après des héritiers de Mme de
Martel par le comte Charles-Henri-Marie de la Poëze, d'une famille originaire
de l'Anjou, et alors établie en Touraine, mais qui, au XVIIIe siècle, fut
représentée en Bas-Poitou par divers de ses membres. C’est alors que Pierre
Maindron aurait quitté le château de la Rabatelière pour prendre
la ferme du château de Linières.
En 1815 il s’enrôla sous les ordres de M. de Puitesson, établit à Chauché, pour combattre le retour de Napoléon de l’île d’Elbe qui avait chassé le roi Louis XVIII. Il s’y distingua dans son titre de capitaine de cavalerie. On sait que de Puitesson, faisant partie de l’armée du comte de Suzannet (habitant Chavagnes-en-Paillers), participa, notamment, au combat contre la troupe du général Travot le 18 mai 1815, près de l’Aiguillon. Il y eut des batailles rangées contre une armée napoléonienne commandée par le général Lamarque. Une de ses divisions était commandée par le général Brayer, le grand-père du futur propriétaire de Linière de 1868 à 1875.
Après
le second retour du roi au pouvoir, Pierre Maindron fut récompensé pour son
passé de combattant. En 1823, il reçut une modeste pension viagère de 100 F.
sur la cassette du roi, et un sabre d’honneur, « seule preuve qui reste à ses enfants des glorieux services de
leur père. Ils conservent aussi précieusement le vieux sabre qui tant de fois
s’est rougi du sang républicain », écrit René Valette.
Pierre
Maindron, ainsi qu’en témoigne cet engagement militaire, était un fervent
soutien des Bourbons. Sous la Restauration monarchique, il accepta les
fonctions d’adjoint et de maire de Chauché. En effet, sur le registre
d’état civil de Chauché, on relève qu’il a occupé le poste d’adjoint au maire à
partir de 1813 jusqu’en 1830, avec une interruption de mai 1818 à novembre
1823, où il occupa lui-même le poste de maire. Dans l’état de nomination au
1e janvier 1826 en tant qu’adjoint au maire de Chauché, Auguste Querqui de la Pouzaire
à cette époque, il est indiqué qu’il est né le 24 septembre 1766 et qu’il est « ancien
officier de l’armée royale vendéenne » (26). L’adjoint et le maire,
dans les petites communes, étaient nommés par le préfet et leur rôle consistait
nettement à relayer la politique de l’exécutif, y compris dans ses aspects
partisans. D’ailleurs, après la Révolution de juillet 1830 qui chassa Charles X
de son trône et installa le roi-citoyen, Louis Philippe d’Orléans, Pierre
Maindron et Auguste Querqui de la Pouzaire démissionnèrent en guise de
protestation contre la prise de pouvoir des libéraux orléanistes dont faisait
partie Guyet-Desfontaines, le propriétaire de Linières. C’est à ce moment-là
aussi que le nouveau pouvoir, ennemi des Bourbons, lui supprima sa pension
d’ancien combattant vendéen.
C’est
pour avoir signé « un libelle dirigé contre l’administration
supérieure de ce Département et ayant pour titre : Réponse à la
proclamation du préfet par intérim du département de la Vendée, en date du 21
novembre 1815 » que le maire de Chauché, M. Puitesson, fut suspendu
de ses fonctions le 31 décembre 1816.
Pierre Maindron va officier ainsi ensuite sur le registre d’état civil de la commune de 1817 à mai 1818 en tant qu’adjoint, puis de mai 1818 à novembre 1823 en tant que maire. Ensuite, M. Puitesson redeviendra maire à nouveau jusqu’en 1825.
La fin de sa vie à Linières de 1830 à 1850
Ingres : portrait de Guyet-Desfontaines
Adjoint
aussi longtemps à la mairie de Chauché et maire légitimiste de la commune pendant
cinq ans et demi, cela n’a pas empêché Pierre Maindron de travailler pour le
député orléaniste Guyet-Desfontaines. Propriétaire de Linières, ce dernier
était connu pour son engagement politique favorable à la
nouvelle monarchie de Juillet, « usurpatrice » pour les légitimistes.
Il défendait les acquis de la Révolution et ne portait pas dans son cœur les
rois Louis XVIII et Charles X, qu’il accusait, entre autres, de manquer de
patriotisme. On l’a entendu répondre à la chambre des députés au ministre
Guizot, rappelant qu’il était allé trouver Louis XVIII en 1814 à Gand, pendant
les Cent Jours, pour lui recommander une politique de la Charte qui soit « constitutionnelle » et non « réactionnaire », à la différence de
la première restauration : « Et pendant ce temps-là, la France
courait aux combats » (27).
Pierre Maindron fut remplacé au château de la Rabatelière par les
nouveaux propriétaires, de la Poëze, laissant la place vers 1832 à un jeune
homme de 24 ans, Jean Renou (28). C’est alors que Guyet-Desfontaines le
récupéra.
Cet
engagement à Linières, entre deux hommes appartenant à des camps politiques
opposés, est moins étonnant qu’il n’y parait au premier abord. En premier lieu,
nous savons que les deux hommes en présence, le propriétaire et le fermier,
sont intelligents.
En
deuxième lieu, il n’était pas facile de trouver sur place un fermier
républicain, voire orléaniste.
Et
puis en troisième lieu, il y a les compétences du fermier. L’époque était au
progrès dans l’agriculture (engrais, machines, plantes fourragères) et à son
encouragement, notamment par les concours des comices agricoles, créés à cet
effet. Or les Maindron de Linières se distingueront. Les fils de Pierre
Maindron obtiendront des prix au comice agricole de Montaigu-Saint-Fulgent :
- En 1857 le 2e prix pour la catégorie taureaux reproducteurs 1 à 2 ans (récompense de 45 F.) et le 1e prix (24 F.) pour la catégorie génisses (est indiqué : Maindron aîné Linières) et le 3e prix (20 F.) pour la catégorie génisses (est indiqué : Maindron jeune)
- en 1859 le 1e prix pour la catégorie taureaux (récompense de 50 F.) et le 3e prix dans la catégorie brebis (récompense de 15 F.)
En
quatrième lieu, il ne faut pas oublier que les orléanistes comme
Guyet-Desfontaines adoptaient une position de juste milieu en politique. Elle
prédisposait ainsi le député à une ouverture d’esprit naturelle à l’égard de
l’ancien combattant Pierre Maindron. Le député voyait ce dernier plutôt comme une
victime des excès de la Révolution. Tous deux étaient monarchistes, mais se
séparaient sur la branche à servir, légitimiste ou orléaniste. Ils n’avaient
pas le même regard sur la Révolution, le légitimiste rejetait tout de la
Révolution et l’orléaniste n’en rejetait qu’une partie.
Que
Pierre Maindron ait conquis l’estime du châtelain de Linières et suscité du
regret à sa mort, se comprend assez bien, malgré les divergences d’opinions politiques.
Ses
liens familiaux avec la famille des meuniers, nommés aussi Maindron, sont
confirmés par sa présence à Saint-André comme témoin d’un mariage le 2 juillet
1832, alors qu’il habitait à Linières (vue 340). La mariée s’appelait Thérèse
Maindron, fille de François Maindron, farinier demeurant à la
Gandouinière. Elle épousait Jean Richard de la Bourolière, fils d’une famille
très éprouvée pendant la Guerre de Vendée.
C’est à Linières qu’il s’est éteint le 14 août 1850 (vue 11 sur le registre de Chauché), âgé de 84 ans. Son épouse y était morte l’année d’avant le 18 juin 1849 (vue 40). Et le 25 juin 1849 (vue 41) naissait à Linières un petit-fils, Jean Marie, fils de Marie Augustin Maindron, 46 ans, et de Jeanne Richard, 35 ans.
Emmanuel François
janvier 2010, et complété en août 2021