Le Pont Boutin
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Quittant le bourg de Saint-Fulgent, en direction de Saint-André-Goule-d’Oie, on arrive rapidement au pont
Boutin. Édifié en 1850, il enjambe le ruisseau du Vendrenneau et marque la
limite entre Saint-Fulgent et Saint-André. Tout de suite après, une pancarte indique
le nom de la Boutinière pour désigner le village situé de chaque côté de la route.
Un nommé Boutin a laissé son nom, non seulement à ce pont, mais aussi au
village.
Un texte de 1671 indique
l’existence d’un « quaireux (cour) du pont Boutin », bordant un pré
appelé « l’Ouche du Pont »
(1). Il se trouvait à l’angle de deux chemins : celui qui va de Saint-Fulgent à Saint-André et celui qui va de Saint-Fulgent à St Florence. Celui-ci, toujours
indiqué sur le cadastre napoléonien de 1838, longeait la forêt de
l’Herbergement-Ydreau, et auparavant conduisait vers la Chevaleraye et la
Brossière. L’ancien pont Boutin était alors situé bien plus bas que le pont
actuel, et le chemin de Saint-Fulgent descendait vers le ruisseau avant de
remonter vers la Boutinière.
Bâti sur le sommet d’une
côte, l’habitat de ce village doit remonter à très loin. On sait que
la voie romaine Nantes/Saintes par Montaigu, Saint-Georges-de-Montaigu, avait, à
partir de Chavagnes-en-Paillers, deux parcours différents. L’un passait par Saint-Fulgent à la Chaunière, puis par la Boutinière (Saint-André-Goule-d’Oie), située
sur la crête d’une colline, et continuait vers les Quatre-Chemins par la
Brossière (2). On peut émettre l’hypothèse que le village de la Boutinière a
été habité depuis très longtemps sur ce tracé.
Espace des anciens moulins de la
Boutinière
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Les vestiges du passé
semblent avoir tous disparus, même les deux moulins à vent du village. Il
faudrait un miracle pour en deviner l’emplacement au milieu de la pelouse d’une
des nombreuses maisons neuves construites à leur place sur le côté est de la
route. En été, l’herbe y sèche plus vite normalement, sauf si l’agriculteur,
qui a repris le champ où ils étaient construits, a régulièrement enlevé depuis
toutes les pierres remontant à la surface.
Ce tènement de la
Boutinière a une origine non documentée, né probablement d’un besoin de se
défendre assumé par un chevalier. Nous en connaissons néanmoins son ancien périmètre,
et il a été constitué d’une concession seigneuriale de plusieurs parcelles
appelées tenures, d’où le mot tènement. Il bordait la rivière du Vendrenneau au
nord et à l’ouest, et se confrontait au tènement du Coudray au sud, et à celui
de la Chevaleraye et des Suries à l’est.
Au 16e siècle
En 1595 ce tènement relevait de la seigneurie des Bouchauds, dont le seigneur avait
résidé dans le bourg actuel des Essarts. Au
16e siècle il avait disparu, son « hôtel » était en ruines, et ses droits étaient alors possédés
par les Harpedanne de Belleville. Avant 1441 le tènement entrait
dans une liste de possessions du Coin où ce dernier prélevait une dîme (3). C’est
donc après que le seigneur de Languiller fit le transfert de la Boutinière dans la mouvance des Bouchauds,
ayant acquis cette dernière seigneurie en 1437. Le tènement de la
Boutinière comportait un habitat constitué en village. Mais ce ne fut pas le
cas de tous les tènements aux alentours : ceux de la Bouguetière, du Dreplar et des Landes de
l’étang du Pin, n’ont pas eu d’habitats attestés.
On sait que les tenures
avaient été acensé (bail à cens) par les seigneurs moyennant le versement de
redevances (cens), sous forme principalement de rentes en céréales et de sommes
d’argent, ou parfois en nature (volaille). Puis les locataires avaient acquis la faculté de transmettre leurs
tenures par succession et vente, moyennant d’autres redevances à verser,
devenant ainsi des propriétaires. Mais ces biens étaient censifs ou roturiers,
payant le cens et autres devoirs seigneuriaux, dans notre cas au seigneur des
Bouchauds.
Les profonds bouleversements
de la propriété foncière que connut le Moyen Âge échappent à notre connaissance
à Saint-André. La documentation dont nous disposons nous
décrit une situation représentative de la paroisse de Saint-André-Goule-d’Oie : peu de métairies, nées au Moyen Âge semble-t-il, et beaucoup de
borderies. Et peu de changements tout au long des 17e et 18e siècles dans cette
répartition des terres.
La métairie de la Boutinière
Ainsi à la Boutinière il y
avait une métairie. En
1796 elle comprenait 15,7 hectares dans 22 prés et champs,
le plus grand d’entre eux faisant 1,8 ha (champ de Coudrette). Son plus ancien propriétaire connu est Pierre Joyneau,
écuyer, seigneur de la Boucherie, maître des Eaux-et-Forêts en Anjou demeurant
en la ville d’Angers. Il la vendit à Jacob Arnaudeau le 20 mai 1625. Ce dernier
demeurait dans le bourg de Saint-Fulgent et appartenait à une famille importante
de la paroisse de bourgeois. Il déboursa 6 274 livres pour cet achat, mais comprenant
en même temps l’achat de plusieurs rentes prélevées à la Chevaleraye,
Machicolière et Maigrière, et quelques bâtiments dans le bourg de Saint-Fulgent : une maison près de la halle, une grange joignant la chapelle Saint-Jean, la petite maison dite de Launay, et quelques jardins et champs relevant
des seigneuries de la Thibaudière et de Saint-Fulgent. Au moment de l’achat, le
métayer de la Boutinière s’appelait Pierre Chatry (4).
Les Arnaudeau comptent au
nombre de ceux qui épousèrent la cause protestante à Saint-Fulgent. Jacob
Arnaudeau sieur des Clavelières, fils de Jacob Arnaudeau et de Renée Varennes,
avocat en parlement, épousa Madeleine Fournau le 6 juillet 1644 au temple de
Châtellerault.
On a repéré aussi François
Arnaudeau, né vers 1620, sieur de la Morinière, fils de Moïse Arnaudeau
(notaire), qui fut greffier à Saint-Fulgent et épousa Marguerite Chervy. En 1644
il acheta des rentes de blés à Jacques Arnaudeau et Gilberte Courpé sa femme.
Le plus connu des
Arnaudeau est le notaire Pierre Arnaudeau, à cause de ses nombreux actes faits
avec Louis Proust au service du seigneur de Languiller, au tournant des 17e
et 18e siècles. Le 19 mars 1688, on le rencontre sur le registre
paroissial, greffier de Saint-Fulgent, qui assiste à la sépulture de René Bertrand
seigneur de Saint-Fulgent , inhumé dans le chœur de l’église. Il était né en 1639,
était catholique et fut syndic (maire) de Saint-Fulgent (13 juillet 1673, vue 19).
Se présentant comme sieur de la Brunelière, il s’était marié à Jeanne de La
Personne qui fut inhumée le 28 octobre 1704 (vue 58) dans l’église de Saint-Fulgent à l’âge de 65 ans. Lui-même a été inhumé dans l’église le 17 juin 1714
(vue 8) à l’âge de 75 ans. Leur fille, Marie Anne Arnaudeau, épousa en 1692
Pierre Gourraud, sieur de la Maisonneuve (4).
Dans la deuxième partie du 17e siècle la métairie de la Boutinière appartenait à Jean Corbière sieur de la Coussay, vivant à Beaurepaire. Il en avait hérité de sa mère, Marguerite Arnaudeau, d’une famille de bourgeois de St Fulgent. Il s’était marié le 11 février 1698 (vue no 64 sur le registre paroissial accessible sur le site internet des Archives de Vendée) à Saint-Martin-Lars en Sainte-Hermine, avec Marguerite Rousseau (née à Saint-Martin-Lars le 26 septembre 1679 avec 13 frères et sœurs), fille de Germain Rousseau, sieur de Landairie, et Marie Robert. À ce mariage était témoin un Rousseau, sacriste de la Grainetière (s’occupe de la sacristie). Ils eurent 4 enfants baptisés à Beaurepaire entre 1699 et 1703. Jean Corbière sieur de la Coussay a été inhumé à Beaurepaire le 23 juillet 1705 à l’âge de 45 ans (vue 48), emporté par la maladie.
A. L. Girodet de Roussy-Trioson : Général de Bonchamps (1860) (Musée d’Orsay) |
Puis la métairie fut acquise en
1712 par Charlotte de La Douespe (1685-1740), épouse de Charles René de Farci, seigneur du
Rozerai (5). Elle fut l’arrière-grand-mère de Charles Melchior de Bonchamps, le
célèbre général vendéen, l’auteur du fameux pardon. Elle était la fille de
François de La Douespe, venu avec son père de Normandie s’installer à Mouchamps chez les Rohan Soubise, protecteurs des protestants. D’ailleurs ses deux frères, sa sœur et ses parents émigrèrent aux Pays-Bas et en Angleterre en raison des persécutions. Ainsi Charlotte de La Douespe récupéra-t-elle le fief-métairie de Puy-Mest (Essarts), dépendant de la seigneurie de la Barette, qui avait appartenu à son frère Jacques en 1672 (6). Elle était veuve en 1717. D’autres membres de la famille de La Douespe firent souche dans la région, comptant parmi leurs descendants Georges Clemenceau (7). Au moment de l’achat à la Boutinière, le « colon » (métayer) était alors un nommé You.
François de La Douespe, venu avec son père de Normandie s’installer à Mouchamps chez les Rohan Soubise, protecteurs des protestants. D’ailleurs ses deux frères, sa sœur et ses parents émigrèrent aux Pays-Bas et en Angleterre en raison des persécutions. Ainsi Charlotte de La Douespe récupéra-t-elle le fief-métairie de Puy-Mest (Essarts), dépendant de la seigneurie de la Barette, qui avait appartenu à son frère Jacques en 1672 (6). Elle était veuve en 1717. D’autres membres de la famille de La Douespe firent souche dans la région, comptant parmi leurs descendants Georges Clemenceau (7). Au moment de l’achat à la Boutinière, le « colon » (métayer) était alors un nommé You.
Vers 1747, la métairie de la
Boutinière, ainsi que celle de la Chevaleraye, furent vendues, probablement par les héritiers de Charlotte de La
Douespe, à Perrine
Bruneau, épouse de Jean Abraham de Tinguy, seigneur de la Sauvagère (Saint-Laurent-de-la-Salle), qui les paya sur ses biens propres pour le prix de 4 950 livres.
Pour cela elle avait été remboursée d’une rente que lui devait Marguerite Elizabeth
Angélique de Farcy du Rozerai, épouse d’Anne Arthus de Bonchamps, chevalier
seigneur de la Baronnière (Anjou). Elle vendit aussi une métairie aux Essarts pour
financer l’acquisition (8).
Le 7 septembre 1766 Jean Abraham
de Tinguy loue la métairie de la Boutinière à Nicolas Audureau, venant du
Plessis-le-Tiers (Saint-André), en remplacement d’un nommé You (9). Il garde la
réserve de deux greniers dans les bâtiments de la Boutinière néanmoins. La
durée du bail est de 5 ans (1767-1572) pour une ferme annuelle de 230 livres.
Les menus suffrages dus au propriétaire sont de 20
livres de beurre net au mois de mai, 6 poulets à la fête de Pentecôte, et 6
chapons à la fête de noël. On peut estimer que le montant de la ferme
représentait à cette époque de l’ordre de 8 % de rendement brut annuel du
capital, bien loin des 3 % environ d'aujourd’hui en Vendée.
Le
montant en argent de la ferme correspond à la valeur de 153 boisseaux de seigle
à la mesure des Essarts, soit 26 quintaux. Compte tenu d’un rendement moyen
autour de 9 quintaux l’hectare ensemencé, tel qu’observé dans la région de la
Chataigneraie, il fallait une surface d’environ 2,9 hectares pour obtenir cette
quantité de grains.
Si le paiement de la ferme avait
été en nature, par partage des fruits des récoltes à moitié, nous aurions
vraisemblablement pu lire dans le bail les cultures pratiquées dans la
métairie. À s’en tenir à des exemples proches à cette époque, on
trouvait : froment (un peu), seigle (surtout), méture (mélange de
semences), baillarge (orge de printemps), orge, avoine, mil, blé noir, pois,
fèves.
Au
prix de la ferme, il faut ajouter le paiement par le métayer du droit de
terrage seigneurial de 1/6 des récoltes après le paiement de la dîme
ecclésiastique, et les autres droits seigneuriaux du tènement, significatifs
ici, mais dont la métairie en supportait la moitié du total probablement.
Enfin, il lui fallait prendre en charge la part réservée aux semences, et payer
les impôts royaux : la taille, et suivant les époques le dixième ou le
vingtième.
Aux
récoltes il fallait ajouter les revenus de l’élevage. Les bovins étaient élevés
pour le trait, et accessoirement pour la boucherie et la vente des bœufs
dressés pour le trait. Ce point est important, or il n’est pas évoqué dans le
bail. Cela veut dire que le propriétaire n’y était pas impliqué, et donc que
vraisemblablement le « cheptel vif »
(animaux) appartenait au métayer seul. Si celui-ci vendait une paire de bœufs
âgés de trois ans et dressés à l’attelage, il encaissait alors une vente
d’environ 130 livres à cette époque. Âgés de huit ans et engraissés pour la
boucherie, leur prix pouvait monter à 240 livres. On voit ainsi, que même
accessoire dans le total du « cheptel
vif », cette paire de bœufs prend une place importante dans le revenu
du métayer, suivant la fréquence de sa vente et les prix pratiqués dans les
foires aux bestiaux des Herbiers, Bazoges, Vendrennes, l’Oie, les Essarts et Saint-Fulgent. Dans cette dernière
localité on comptait 7 foires autorisées dans l’année (Mardi de Pâques, Mardi
de Pentecôte, Petite Saint-Jean : 6 mai, Saint-Claude : 6 juin, Grande Saint-Jean : 24 juin, Saint-Côme : 27 septembre et Saint-Fulgent : 8
octobre). Or la fréquence des
ventes dépendait de la surface des prairies naturelles disponibles, et des
aléas des épizooties et variations climatiques. Encore fallait-il être
suffisamment riche pour posséder le cheptel d’animaux nécessaire. C’est
pourquoi certains métayers affermaient une partie du bétail dans des baux à
« cheptel de fer ». Il
faudrait aussi ajouter le « menu
bétail », principalement les « bêtes bêlines », mais ne représentant qu’une valeur d’appoint.
Un mouton pouvait valoir 5 livres et une brebis 2 livres. Néanmoins la livre de
laine en poids se montait à 1 livre en argent. On remarquera qu’aucune valeur
d’appoint n’est à négliger dans cette économie proche de la subsistance.
L’élevage
ne subissait que les impôts royaux, et à la Boutinière on ne rencontre pas de
dîme sur les animaux. Cela confirme bien son rôle cantonné à un moyen de
production à l’origine au Moyen Âge, comprenant aussi la production d’engrais
naturel. Accessoirement, il constituait un moyen de subsistance pour les
fermiers à cause du lait des vaches. Et ensuite, il pourra devenir partiellement
un facteur d’enrichissement, même limité par la surface des prairies
naturelles.
Le
Vendrenneau à la Boutinière au mois de juin
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L’importance
des prés le long du ruisseau du Vendrenneau rend très probable cette ressource
complémentaire à la Boutinière, à laquelle s’ajoutaient les terres en guéret et
en partie les landes en jachère pour nourrir les bêtes. Moyennant quoi, un
métayer d’une métairie comme celle-ci, même chargé du prix d’une ferme,
possédait un potentiel de revenus plus élevée que celui de beaucoup de petits bordiers
propriétaires. La surface cultivée constituait, dans la comparaison, le facteur
essentiel de différentiation, à cause de la pratique des jachères, celles-ci
neutralisant presque la moitié de la surface d’une métairie.
En
dehors des redevances et impôts que nous avons évoqués, les autres charges du
métayer n’étaient pas importantes : on n’achetait pas d’engrais le plus
souvent à cette époque, et on fabriquait l’essentiel de ses outils en bois.
Néanmoins il fallait payer les outils en fer au maréchal et les roues au
charron. Puisqu’en économie de subsistance et autarcique tout compte, il faut
noter l’achat des « hardes »
(habits), quoique parfois, même dans les métairies, les femmes filaient et
tissaient la laine. L’essentiel de la nourriture provenait du jardin et des « menus animaux » élevés. Quant à la
main d’œuvre, elle était gratuite, fournie par la famille, femmes et enfants
compris. Tout au plus au moment des moissons engageait-on des
« valets ». Et si la taille de la métairie le nécessitait, on s’engageait
en communauté avec les parents, ou frères et sœurs de l’un des époux. Dans
cette communauté familiale, tout le monde vivait « au même pain et pot », frugal dans le meilleur des cas (voir
l’article publié sur ce site en 09-2012 : Les communautés familiales d’autrefois dans le canton de St Fulgent). Mais quel malheur en cas de maladie ou d’accident, s’il
fallait engager des valets.
On
lit dans le texte du bail de 1766 que le métayer sera « tenu à toutes corvées et mandées, tant
d’hommes, de femmes, que bœufs et charrettes », suivant la formule
rituelle, alors que la pratique était restreinte par la coutume du Poitou.
Pour les arbres, que le preneur
n’a pas le droit d’abattre ni de « gîter »
(prendre des jeunes pousses), des exceptions sont prévues : un chêne
têtard chaque année « propre à faire des bûches, pendant le cours des
présentes deux vergnes (aulne) pour faire des sabots, ainsi que le
bois dont le preneur aura besoin pour l’entretien de ses charriages (charrettes)
». Ces arbres seront choisis par le propriétaire.
Les autres clauses sont celles
que l’on trouve habituellement à cette époque : laisser à la sortie ce
qu’on a trouvé en entrant dans le bail de paille, foin et engrais, labourer
suivant l’assolement prévu par la coutume, entretenir les prés (nets de ronces
avec un bon écoulement des « rouères »
ou rigoles), les fossés, les barrières des champs et les haies (coupes d’un 1/5
des branches des arbustes par an), refaire les couvertures des logements et
bâtiments une fois dans le cours du bail (en végétal séché parfois), les matériaux
étant fournis par le propriétaire. Suivant l’usage, le métayer supportera la
charge des droits seigneuriaux reposant sur les propriétaires. Enfin le preneur
s’oblige à la prison en cas de non-respect de son bail : « le preneur
s’oblige même par corps à tenir prison close comme pour deniers royaux, attendu
qu’il s’agit de ferme de biens de campagne ».
C’est dire si les mœurs ont changé ! On devine derrière la formule la
fragilité de la condition des métayers, qu’il faudrait étayer par des
documents dans notre cas.
Blason
des Tinguy
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Le 7 juin 1771 Jean Abraham de
Tinguy loue la métairie à André Roy qui venait de la Giroulière (Rabatelière)
en remplacement de Nicolas Audureau (10). Il l’avait déjà louée le 8 avril
précédent à Jean Augereau, habitant la Chardière de Chavagnes. Mais ce dernier
comptait sur son père pour s’associer avec lui dans le bail, et le père refusa
de quitter la Chardière. Alors « ledit Augereau ne
se trouve pas assez fort pour faire seul ladite métairie », et le bail fut résilié avant même d’avoir
commencé.
André Roy et sa femme Jeanne
Auvinet s’engagent sur un bail de cinq ans (1772-1777) moyennant une ferme
annuelle de 264 livres, et des menus suffrages d’un agneau à Pâques ou 3 livres au choix du bailleur. Les autres
clauses du bail reprennent celles du précédent avec Nicolas Audureau, sauf sur
un point : les corvées sont allégées et mieux précisées. On devine que la
clause a fait l’objet d’une discussion, car on ne s’est pas contenté de la
formule générale et tout prête des notaires.
Il est écrit que le preneur est
tenu « d’un charroi à trois lieues à
la ronde pendant le cours des présentes »,
ce qui est peu et inférieur aux limitations de la coutume du Poitou, étant bien
précisé que le bailleur ne pourra « rien
demander ni exiger du preneur les années qu’il pourrait ne pas lui faire faire
ledit charroi, ni les répéter d’une année à l’autre ». La nourriture
des « bouviers »
(conducteurs de bœufs), sera prise en charge par le bailleur « seulement que lorsqu’ils seront en la
demeure dudit sieur bailleur, soit en partant, soit à leur retour »
(la coutume le prévoyait déjà).
Le
2 janvier 1776 un nouveau bail est signé pour 7 ans (1777-1784), moyennant 300
livres par an. Le métayer André Roy est remplacé par la communauté de Jean
Boisselier, marié à Françoise Drapeau, et de Nicolas Girard, marié à Marie
Boisselier, demeurant à la Chevaleraye. Le montant de la ferme a augmenté de
13,6 %. Les menus suffrages ont changé : 4 poulets, 4 chapons et 10 livres
de beurre par an, mais sans représenter un changement significatif de charges.
En revanche les corvées ont aussi augmenté : un charroi pour M. Tinguy de
la Sauvagère à 3 lieues de distance maximum par an, et 10 charrois par an avec
bœufs, charrette et un homme pour charroyer les bois, landes et fournilles (menu bois et branchages pour chauffer un four)
du bailleur. C’est que le bailleur n’est pas le propriétaire. M.
de Tinguy a baillé sa métairie à un boulanger demeurant dans le bourg de Saint-Fulgent,
René Deboeuf. Et ce dernier a sous-affermé. Nous ne disposons que du contrat de
sous affermage, et nous ne savons pas pourquoi on a procédé ainsi (11).
La veuve d’Abraham de Tingy,
Perrine Bruneau, vendit la métairie de la Boutinière, avec celle de la
Chevaleraye, en novembre 1789 à Agnan Fortin, le dernier seigneur de Saint-Fulgent, moyennant la somme de 22 000 livres. On était entré dans une époque
d’hyper inflation des prix avec la Révolution française.
Confisquée et mise sous séquestre
à cause de l’émigration de son fils aîné, Agnan Fortin l’afferma à l’administration municipale du canton de Saint-Fulgent,
le 12 germinal an V (1-4-1797). Puis il la sous afferma le 29 thermidor suivant
(16-8-1797) à Marie Boisselier, veuve Girard pour 280 F par an (12).
En 1805, l’inflation a cessé
grâce à Napoléon, et Guy Augustin Fortin (fils du précédent) loue la métairie
400 F par an à Marie Boisselier veuve Girard et sa communauté (13). Pour une
surface d’environ une vingtaine d’hectares, le montant du fermage parait
normal, c’est-à-dire que les bâtiments d’exploitation, après
les destructions de la guerre de Vendée, ont été vite reconstruits. La maison (chambre haute
et basse), grange, toit à bœufs, et fournil, avaient été totalement brulés.
Enfin, pour illustrer la
situation d’un bordier à la Boutinière, on pourra relire le passage consacré à
Christophe You dans l’article publié sur ce site en avril 2013 : Simon Charles Guyet à St Fulgent (1733-1793. Ce dernier avait en effet acheté à C. You en rente viagère une borderie à la
Boutinière dans l’année 1776, d’une surface de 2 hectares.
Le paysage de la Boutinière avant la Révolution
Le Vendrenneau près de la
Boutinière
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Les prés étaient
importants à la Boutinière. Ainsi « le
pré des Rivières » et de « Coudrette »
faisaient deux ha, le « pré de la
Fontaine », aussi appelé « Pré
Poiron » faisait un ha. La proximité de la « rivière qui descend de Vendrenneau au pont
Boutin » l’explique en grande partie.
Cette désignation du ruisseau du
Vendrenneau en 1671 est révélatrice. Les ruisseaux prenaient parfois naissance
dans des étangs : le Vendrenneau à Vendrennes, Fondion et les Noues à St
André. Ces derniers donnant naissance « au ruisseau qui descend de Fondion en la rivière de Vendrenneau »
et « au ruisseau descendant de
l’étang des Noues ». Mais ces dénominations changent sur le parcours
du ruisseau. Plus près de l’amont, elles désignent les sources véritables dans
la forêt de l’Herbergement proche. Les sols sont humides on le voit, et favorisent
les prairies naturelles, à une époque où on ne cultivait pas encore les
prairies artificielles dans cette région, faute d’engrais en assez grande
quantité. C’est que les terres acides du bocage avaient une fertilité
insuffisante.
Dans l’énumération des surfaces
foncières, les parcelles de jardins étaient notées avec précision.
Bénéficiant par priorité du peu d’engrais naturel disponible, de l’eau de la
fosse du village ou d’un ruisseau proche, elles nourrissaient les familles. Avec
elles, on voit l’importance de l’économie de subsistance qu’elles permettaient.
Ainsi le « Grand Jardin »
de la Boutinière occupait 2 400 m2, partagé entre les habitants
du village.
Et il y avait des vignes comme
partout : celle de la Boutinière descendait le petit coteau jusqu’à la route de
la Chevaleraye (malgré une exposition au nord). En 1664, il y avait une
boisselée de vigne appartenant à un greffier habitant le bourg de Saint-Fulgent,
Arnaudeau, sur les sept boisselées en culture (14). Au tènement des Suries voisin,
une partie du « champ du Chêne Creux »
était plantée en vigne (15).
Ce qui retient l’attention dans
la description des confrontations des champs et des prés, c’est la présence des
chemins. Ils ont apparemment été tracés dès l’origine en même temps qu’on
défrichait. Ils n’étaient pas classifiés comme ce fut le cas à partir du 19e
siècle, quand on créa les routes. Tout juste remarque-t-on trois catégories,
pas toujours bien distinguées en pratique : les grands chemins, en général
pour les liaisons entre les bourgs des paroisses, les chemins pour les liaisons
entre les villages, et les chemins de servitude pour se rendre dans un champ ou
autre lieu précis d’un tènement. Ils n’étaient pas empierrés et la boue par
temps pluvieux constituait le lot commun, d’autant qu’il n’y avait pas toujours
des fossés.
Sur ces chemins entourés de haies
plantées d’arbres, presque tous têtards, le voyageur à cheval devait écarter
les branches, même le voyageur à pied parfois, pour ne pas se blesser au
visage. En hiver la situation était pire, car il fallait marcher près des
haies, le milieu du chemin étant impraticable à cause de l’eau et de la boue.
Et encore cette situation hivernale pouvait durer près des deux tiers de
l’année. Ainsi s’exprime un habitant de la Chataigneraie dans la revue des
« Affiches du Poitou » en
1773 (16).
On désignait les chemins par leur
liaison, comme nous avons le « chemin
du bourg de Vendrennes au Coudray Loriau », qui bien sûr pouvait être
désigné autrement : « le chemin
par où l’on va du Coudray Loriau à la Brossière ». De même « le chemin de Saint-André à la
Javelière » était aussi
« le chemin de la Ridolière à la Javelière ». À y regarder de
près il y avait plus de chemins que maintenant, car plus d’habitats dispersés
et plus de parcelles foncières qu’il fallait desservir. Ainsi que sont devenus
« le chemin de la Javelière à la
Remigerère », « le chemin
de l’étang des Noues à Saint-Fulgent », « le chemin de la Grande Noue à la Boutinière » ?
Les propriétaires et leurs redevances seigneuriales
La Boutinière
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En 1618 les propriétaires du
tènement de la Boutinière étaient Julien Paynaud, Michel Chatry, Michel
Rabereul (habitant au Coudray), Nicolas Cougnon et la veuve d’Antoine Cougnon
(habitants de la Chevaleraye). Il est probable que cette liste de propriétaires
est incomplète, n’étant pas certain que toutes les déclarations roturières
aient été conservées.
Ils devaient au seigneur de Saint-Fulgent un droit de terrage consistant, à partir de 1560, à prélever 1/12 des
récoltes, « rendables en votre
chastel de votre ville de Saint-Fulgent ». Un autre 1/12 était prélevé au
profit du baron des Essarts. Mais quelques rares champs en étaient exonérés et
ne payaient qu’un modeste cens (17). Des cens et rentes féodales étaient dues à
différents termes de l’année, au total : 4 boisseaux de seigle, 48 ras
d’avoine et 3 livres 4 sols en argent. Un bian (corvée) de 4 bœufs et
charrette dû de 15 jours en 15 jours par la Boutinière à la seigneurie des
Bouchauds, avait été affermé 2 livres par an payables par moitié à noël et Saint-Jean
Baptiste. Ce fermage était déjà compté en 1477 (18), et il fait partie du
devoir en argent ci-dessus. Nous reviendrons prochainement sur ces
droits seigneuriaux, avec ceux de la Chevaleraye et de la Javelière, en
racontant l’opposition des seigneurs de Saint-Fulgent et de Languiller à leur
sujet.
En plus il y avait la rente
foncière due à la seigneurie de la Roche de Chauché, possédée par la
Rabatelière dès le 17e siècle. À la Boutinière elle se montait
à 4 boisseaux de seigle à la mesure des Essarts, répartie entre les
propriétaires. On la rencontre dans quelques autres
tènements de Saint-André d’un montant variable, aussi des Essarts et de Chauché, et
remontant à une époque indéterminée (19).
Suivant Théophile de Tinguy, la
Roche de Chauché constitua pour la famille Bruneau une branche détachée de la
Rabatelière, au même titre que la Giroulière proche (20). Au 14e
siècle La Roche appartenait aux Rezay, seigneurs de la Merlatière, Jarrie,
Raslière et Saint-Fulgent. Elle passa en 1450 aux Bessay par le mariage d’Isabeau
de Rezay avec François de Bessay, puis en 1473 aux Saligné par le mariage de
Marie de Bessay avec Jean de Saligné (20). En 1571, suite à un partage entre Gilon
de Bessay et Alexis Royrand, ce dernier, seigneur de la Patissière, prend la
moitié par indivis de l’hôtel noble et métairie de la Roche de Chauché. L’autre moitié indivis appartenait en 1507 à
Louis Marchand, seigneur de la Métairie, à cause de Jeanne de Saligné sa femme
(21).
Il existait à la Boutinière un
droit particulier dit de « rivage »,
comme au Clouin et à la Porcelière. En Poitou, c’était le droit de couper les
joncs et autres plantes aquatiques qui croissent sur le bord des rivières (22).
L’ouvrage consulté fait état d’un usage par les meuniers qui fauchaient ces
plantes pour les donner en nourriture à leurs mulets. On hésite à appliquer le
droit de rivage à cet usage, car on rencontre la redevance dans les
déclarations de tous les propriétaires du tènement et nullement dans celles des
seuls meuniers de la Boutinière. Il parait probable que les plantes fauchées ne
nourrissaient pas que les mulets des meuniers, et pouvaient aussi fournir la
matière première des toitures des maisons. En tous cas, le débit des ruisseaux
proches à St André exclut un lien entre ce droit et la navigation sur une
rivière, qui est pourtant retenu par la documentation disponible habituelle sur
le droit de rivage. Celle-ci ne tient pas compte de cette particularité propre
au Poitou.
En l’état actuel de nos
recherches, ce droit de rivage, lié aux fauchages des plantes des
ruisseaux, semble différent de la redevance due au seigneur de la Boutarlière
pour les abreuvages de l’étang du Pin, qui était de 8 ras d’avoine en 1764
(23).
Les 4 sols payés au titre du
droit de rivage par les teneurs de la Boutinière, à la fête de Notre-Dame de
septembre (nativité), représentait un montant symbolique en 1606. Et à cette
date celui-ci était partagé entre quatre bénéficiaires. Le baron des Essarts
prenait un sol, le seigneur de Languiller prenait un autre sol et le sieur de
la Patissière prenait les deux derniers. Celui-ci s’appelait Louis Payneau,
greffier de la baronnie de Montaigu demeurant à la Patissière en la paroisse de
Boufféré (24).
À ces redevances seigneuriales
s’ajoutaient souvent d’autres charges collectives supportées par les
propriétaires d’un tènement. Ainsi à la Boutinière, il existait sur le village
une rente foncière annuelle et perpétuelle de 60 boisseaux de seigle due à un
particulier. Bien sûr il y avait à l’origine de ces rentes une contrepartie
dont avaient bénéficié les propriétaires, jamais indiquée. Le droit se
perpétuait au fil des siècles parfois. Dans notre cas nous en prenons
connaissance, car la rente a été achetée le 4 octobre 1649 par le prieur de la
paroisse, Pierre Moreau, appartenant à une riche famille de bourgeois demeurant
dans le bourg de la paroisse. Le vendeur est maître René
Rabreuil sieur de la Boutinière, pour sa femme Suzanne Gallot, moyennant la
somme de 110 livres. (25)
Les moulins à vent de la Boutinière
Une particularité intéressante à
la Boutinière, ce sont ses deux moulins à vent, situés au sommet de la butte,
proches du « Grand chemin qui
conduit de Saint-Fulgent au bourg de Saint-André-de-Gouledois », sur le côté
est. Sur le ruisseau du Vendrenneau on a repéré en 1675 deux moulins à
eau : « le moulin à Grolleau »,
et le « moulin aux draps »,
en la paroisse de Saint-André, situé sur le tènement voisin de la Bergeonnière (26).
Peut-être y en avait-il situés sur la paroisse de Saint-Fulgent.
Le « moulin à Grolleau » est visible sur le cadastre napoléonien
de Saint-André (1838) dans le tableau d’assemblage (E) de la Boninière. Il
n’est pas à confondre avec un autre moulin à eau situé du même côté
(Saint-André) et plus proche de la Boutinière. Celui-ci était d’une construction
récente, vers 1860/1870, et a été démoli au début du 20e siècle par
M. Boisson, lequel l’avait fait tourner. Ce moulin appartenait à la famille
Soulard, famille maternelle d’Eugène Boisson, et on l’appelait « le moulin
Soulard ». Aux meuniers Soulard succéda le meunier Marché. Ces
renseignements proviennent d’une visite sur les lieux en 1977 par l’abbé
Boisson, guidé par M. Boisson (27).
Nous connaissons l'existence des moulins à vent par les déclarations roturières faites au seigneur du lieu. La plus ancienne
qui mentionne un moulin à la Boutinière date du 7 juin 1595. Maurice Rabereul y
déclare « un moulin à vent turquois
avec pale droit » (28). Les mots employés restent en partie un
mystère. On sait seulement que les moulins à vent, introduits en Europe au
moment des croisades au Moyen-Orient, dit-on, étaient appelés à l’origine « tours ailées » ou « moulins turquois ». Les deux expressions désignent
deux types de moulins différents.
Un livre récent nous apprend que les moulins
turquois possédaient une cabine solidaire d’un pivot, ce dernier inséré dans
une tour maçonnée. Le moulin à pivot tournant, était encore appelé moulin « massie »
ou moulin « chandelier ». La cabine en bois, supportant les ailes, tournait
par pression manuelle sur son échelle d’accès ou main courante (29). Ce type de
moulin se distingue des moulins-tours, les plus fréquemment rencontrés en
Vendée, comme celui de Bel Air à la Rabatelière, remarquablement restauré, ou
celui de la Bourolière, dont la toiture a disparu. Leur tour en maçonnerie, de
forme ronde appelée « tonnelle », était surmontée d’une toiture de
forme conique. Elle tournait par pression sur une perche, et supportait les
ailes. Les moulins étaient parfois bâtis sur une surélévation, une butte ou motte
appelée « cerne », pour pouvoir manœuvrer les ailes.
moulin turquois |
Maurice Rabereul était un meunier
habitant au Coudray (Saint-André), possédant un tiers en indivision du moulin, les
deux autres tiers appartenant alors à un nommé Maurice Beriau. Ce moulin était
bâti sur une parcelle de terre d’une demi-boisselée (environ 600 m2).
En 1595, la seigneurie des
Bouchauds, dont dépendait la Boutinière, était déjà devenue la propriété du
seigneur de Languiller, elle-même possédée par les seigneurs de Belleville. La
déclaration roturière est adressée au « haut et puissant messire Léonor Chabot de Saint-Gelais, chevalier seigneur
de Jarnac, au nom et comme tuteur ordonné par écrit de la personne et biens de
demoiselle Marguerite de Belleville comtesse de Cosnac, Belleville et
Languiller ».
Léonor Chabot, baron de Jarnac et
seigneur de Saint-Gelais, était le deuxième époux de la tante de Marguerite de
Belleville, Marguerite de Durfort-Duras. Il était aussi le fils de Guy Chabot, l’auteur
du fameux « coup de Jarnac » en 1547, contre François de Vivonne, seigneur de la
Chataigneraie (Vendée). Marguerite de Belleville épousera
bientôt Emmanuel Philibert des Prez, dit de Savoie.
Les redevances féodales dues au
seigneur de Languiller étaient de 2 sols et 6 deniers par année « rendables en votre châtel du lieu de
Languiller en chacune fête de Saint-Jean-Baptiste ». S’ajoutait le
paiement de 2 chapons au profit du baron des Essarts. Ce dernier était resté en
effet propriétaire d’une partie des droits seigneuriaux des Bouchauds.
Cette situation signifie que dès
cette époque le moulin n’appartenait pas au seigneur des Bouchauds. Soit il
l’avait vendu, soit il avait donné l’autorisation d’en construire un sur ce
tènement de la Boutinière faisant partie de sa mouvance. Il n’en touchait
qu’une redevance appelée cens, de faible valeur pour l’époque, qu’il partageait
avec le baron des Essarts.
Jean
Burkhalter : Moulins en Vendée
|
Le 2 juillet 1614, le moulin est
toujours possédé en indivision par Maurice Rabereul. Mais les autres parts
appartiennent à deux autres habitants du Coudray, aussi meuniers : Pierre
Netraud et Pierre Ardouin (30). On apprend dans la déclaration roturière à
cette date qu’on l’appelle le « moulin
de Bordron », référence probable à son constructeur d’origine.
Une parcelle de terre a été
achetée, portant la surface du terrain possédée à 2 boisselées. Sur elle le
seigneur prélève un droit de terrage au 1/6 des récoltes, qui doit être apporté
« chaque fête de Notre-Dame en août »
(assomption).
Mais la nouveauté de la
déclaration de 1614, outre les propriétaires en partie différents, c’est le
seigneur qui a changé. C’est celui de Saint-Fulgent, à cause de ses fiefs de la
Chevaleraye et Boutinière, dont il se considère le seigneur. Il s’appelait Jacques Bertrand et avait
hérité de la seigneurie de Saint-Fulgent de sa mère, Charlotte Chasteigner, qui
avait épousé Christophe Bertrand. Il prétendait posséder la mouvance et le
droit de fief sur la Boutinière, à la place du seigneur de Languiller. Nous
reviendrons plus tard sur cette querelle qui a duré près de deux siècles entre
ces deux seigneurs, et qui s’alimentait notamment dans les arcanes du droit
féodal. Les pauvres meuniers ne devaient pas être à l’aise dans cette querelle,
et devaient aller vers le plus exigeant du moment, craignant de payer à l’un et
à l’autre, au lieu de l’un ou l’autre.
Les redevances payées en 1614 sont
les mêmes qu’en 1595, mais le seigneur de Saint-Fulgent a tenu à faire reconnaître
son droit de basse justice sur le moulin, comme un signe manifeste de son droit de fief.
À la Boutinière
|
L’autre moulin était aussi
possédé par des particuliers. Il avait fait l’objet d’une déclaration roturière
au seigneur de Saint-Fulgent six semaines auparavant, le 21 mai 1624, par
Marguerite Leray (31). C’était la veuve d’un Moreau sieur du Plessis, frère de
Jacques Moreau sieur du Coudray. Ce dernier avait épousé Jeanne Laheu et est décédé
avant 1617 (32). Nous avons raconté l’histoire de cette famille dans notre
article publié sur ce site en juin 2014 : Les Moreau de St André Goule d'Oie aux 17e et 18e siècles.
Avec son beau-frère Jacques
Moreau et son neveu Jacques Thoumazeau, Marguerite Leray déclare un champ appelé « l’Ouche du Moulin »,
laissé en indivision entre les trois cohéritiers, et situé à côté de son moulin
de la Boutinière. Le droit de terrage qui y est prélevé, est partagé par moitié
entre le seigneur de Saint-Fulgent et le baron des Essarts.
Marguerite Leray ne possède que
la moitié de cet autre moulin, l’autre moitié appartenant à Denis Maignan. Peut-être ce dernier était-il
meunier, louant la partie ne lui appartenant pas. Ou bien les deux
propriétaires louaient-ils le moulin à un meunier pour son exploitation. Le
bail était alors rédigé comme celui d’une métairie, moyennant un loyer en
argent.
Ce moulin était bâti sur une
pièce de terre de 2 boisselées, une partie en jardin et l’autre en terre
labourable, franche de droit de terrage. S’y trouve aussi une « maison à chapt » (toit à deux
pentes et faîte au milieu).
Les redevances dues pour ce
moulin sont partagées à moitié entre le seigneur de Saint-Fulgent et le baron des
Essarts et payables à noël : 2 chapons et 1 feston de cens. À cette date
le feston était une somme d’argent valant 14 sols 6 deniers ; plus tard il
vaudra 15 sols.
À la Boutinière
|
Près de 60 ans plus tard, le
moulin a changé de propriétaires. Dans une déclaration de 1671, la moitié par
indivis est possédée par Louis Payneau sieur de la Patissière (33). Nous ne
connaissons pas le propriétaire de l’autre moitié. Cette déclaration est faite
au seigneur de Saint-Fulgent, René Bertrand. C’est le petit-fils de Jacques Bertrand
que nous avons cité auparavant, rendu célèbre par le rapport de Colbert de
Croissy et Barentin à Louis XIV sur l’état du Poitou. Colbert de Croissy lui fit
une réputation abominable. C’était un protestant bagarreur il est vrai, ce qui
a peut-être suscité quelque exagération. Les redevances seigneuriales n’ont pas
changé à cette date.
Le 29 mars 1698, Catherine
Payneau a pris la suite de son parent dans la propriété de la moitié du moulin.
Elle fait ce jour-là une déclaration roturière à quelqu’un dont le nom est
laissé en blanc ! Mais l’autre moitié appartient toujours au seigneur de Saint-Fulgent. À cette date les couteaux étaient tirés entre les seigneurs de Saint-Fulgent et de Languiller, ce qui explique le blanc bien volontaire qui parait
dans le document, pour ne pas choisir entre les deux prétendants au droit de
fief (34). Les redevances seigneuriales sont toujours les mêmes.
Catherine Paynaud est alors veuve
de Pierre Maillocheau, sieur de la Daunière, demeurant à la maison noble de la
Cantinière paroisse de Saint-Hilaire-de-Loulay. Elle y avait emménagé probablement
après le décès de son mari. Avec lui elle avait vécu à Mesnard-la-Barotière,
après s’être mariée à Boufféré le 6 février 1668 (vue 2). Ses neuf enfants sont
nés à la Barotière, dont 5 survécurent.
En 1727, Claude Prosper Moreau
possédait une rente de deux boisseaux de froment sur un des deux moulins de la
Boutinière (35).
N’ayant pour source d’information
que des déclarations roturières dues au seigneur local, nous n’en saurons pas
plus sur l’activité des moulins. Ils étaient nombreux en ce 17e
siècle et ne servaient pas qu’à fabriquer la farine. Mais nous ne connaîtrons
pas mieux les meuniers et leur vie, ni leur production, ni leurs modes
opératoires, ni leurs clients, et ni leurs comptes. Dans son livre sur les moulins de Vendée, Elie Durel
indique que les meuniers se payaient au dixième. Ils « craulaient ». « Sur
une rasière, soit 80 kg, le client retrouvait 51 kg de farine, et 21 kg de son,
8 kg servait à payer le meunier » (36). Les moulins à vent pouvaient
moudre de 14 à 20 hectolitres de grains par jour dans de bonnes conditions de vent. Le meunier
apportait la mouture non tamisée à son propriétaire dans de grandes pochées
longues d’environ 1,50 m et peu larges, fabriquées en toile de lin. Il
repartait avec les mêmes pochées remplies de grains à moudre (37).
On remonte au plus loin à un « moulin à Grolleau » dans une déclaration roturière vers 1675 décrivant les limites du tènement de la Bergeonnière (38). C’était un moulin à eau situé sur le ruisseau du Vendrenneau. Cette famille de meuniers était donc installée à la Boutinière depuis au moins cette date, mais on la rencontre dans des actes permettant de constituer une généalogie avec
Les Grolleau, meuniers de la Boutarlière
On remonte au plus loin à un « moulin à Grolleau » dans une déclaration roturière vers 1675 décrivant les limites du tènement de la Bergeonnière (38). C’était un moulin à eau situé sur le ruisseau du Vendrenneau. Cette famille de meuniers était donc installée à la Boutinière depuis au moins cette date, mais on la rencontre dans des actes permettant de constituer une généalogie avec
Clément
Grolleau, marié à Perrine Coutand. Au moment de faire son testament en 1765, sa
fille Jeanne est décédée, laissant une fille, Marie. Son gendre, Pierre Roturier,
s’est remarié et a quitté la communauté existante entre lui, son beau-père et
son beau-frère (André Grolleau). Pierre Roturier loue à ces derniers sa part (un quart) dans le
Grand moulin à vent. Dans la nouvelle communauté après son départ, le père, le
fils et la bru sont fondés chacun pour un tiers des biens meubles et effets,
valant au total 300 livres (39). Ils vivent ensemble, et Clément Grolleau lègue à sa
bru Marie Mandin (femme d'André), « en reconnaissance de ses soins, tous mes meubles et
effets mobiliers, morts et vifs, ensemble tous mes acquêts et conquêts
immeubles tant à prix d’argent que d’arrentement, et le tiers de mes anciens
biens fonds, et généralement tout ce que la coutume du Poitou permet de donner ». À sa petite-fille, Marie Roturier, il lègue la somme de 30 livres (40).
Clément Grolleau achète le 18
avril 1768 le ¼ du deuxième moulin à vent de la Boutinière appelé le « Petit
Moulin », à Joseph Lhériteau bordier demeurant à la Gallerie (Vendrennes),
partageable entre eux et la veuve You du Puygreffier. Le prix d’achat est de
200 livres, comprenant aussi des domaines au Coudray, où Grolleau demeure. Une
partie du prix d’acquisition est payé au moyen d’une remise de dettes par
Grolleau à l’acquéreur, concernant des livraisons de farine (41). On le verra d’autre
fois, comme son fils, convertir en rentes perpétuelles des dettes d’agriculteurs
lui apportant leurs céréales à moudre. Les Grolleau avaient un autre moulin sur
la rivière du Vendrenneau.
Il est mort vers 1770, et son fils
André Grolleau (1734-1803), épousa à Saint-André le 26 février 1754 Marie Anne
Mandin (vue 113 du registre paroissial). Vers 1785 celui-ci quitta le Coudray pour
venir habiter au village de la Boutinière près de ses moulins. Il fit des
achats de biens fonciers, peu importants à chaque fois, à la Machicolière (deux
fois), la Porcelière, aux Gâts, au Coudray. Il entreprit en 1783 la
construction d’une grange au village de la Boutinière, le long d’une pièce de
terre appartenant à Abraham de Tinguy, qui demeurait alors à la Giroulière avec
sa femme. Ce dernier protesta d’un empiétement de terrain et d’une gêne pour l’écoulement
des eaux. L’histoire en elle-même a peu d’intérêts, mais à lire la transaction
qu’ils signèrent devant notaires pour régler le conflit, on voit deux personnes
traiter d’égal à égal. Et pourtant l’un était noble et l’autre roturier. Que le
noble ne fût pas seigneur de la Boutinière ne parait pas avoir influé sur les
comportements, sauf probablement dans les rapports de civilité (42).
Avec sa femme André Groleau eut cinq enfants. Le premier est Marguerite
Groleau, qui se maria avec René Monnereau, forgeron à Saint-Martin-des-Noyers.
Leur fils Pierre Monnereau (1787-1856) sera curé des Brouzils et fonda la « Congrégation des sœurs des sacrés cœurs de Jésus et Marie »,
autrement dit « les sœurs de Mormaison ». Le pape l'a déclaré « vénérable »
en 1997.
Père Pierre Monnereau
|
Deux de ses frères se marièrent
le même jour avec deux sœurs, à Saint-André le 9 février 1779 (vue 98). François
Groleau épousa Françoise Pouzet, et Jacques Groleau épousa Jeanne Pouzet. Cette
similitude de destins ne s’arrêta pas là, malheureusement. Ils furent tués par
les bleus le même jour en 1794. En effet, Jacques Groleau est mort « dans les flots de la première guerre de la Vendée »,
écrit sur le registre d’état-civil le maire de Saint-André, François Cougnon, fils
de l’ancien capitaine de paroisse (vue 137 sur le registre, au décès de sa
femme, Jeanne Pouzet le 2-10-1827). Son fils Jacques continua les affaires de
son père, car le cadastre napoléonien nous indique en 1838 qu’il était meunier
à la Boutinière. Et dans le registre de
reconstitution d’actes 1793-1801, à la vue no 9, on peut lire que Jacques
Groleau « a été tué par les troupes
républicaines le 26 février 1794 à Saint-Fulgent ». À la vue no 13 du
même registre on lit en plus que « François
Grolleau qui demeurait à la Boutinière … a été tué par les troupes
républicaines le 26 février 1794 ». C’était le frère de Jacques, et on était en
pleine révolte contre les colonnes infernales.
Les sœurs Pouzet avaient aussi un
frère, Jean Nicolas, qui épousa Aimée Bordron, et une sœur, Marie, qui épousa Jean Bordron (1748-1813). Dans
ces deux mariages, le même jour en 1770 (vues 5 et 6 à Saint-André-Goule-d’Oie),
ce sont les couples Jean Pascal Pouzet, époux de Françoise Regrenil (de
Sainte-Florence), et Jean Bordron époux de Renée Auvinet, qui marièrent leurs
enfants. Les Bordron habitaient le bourg de Saint-André, où le mari était
maréchal-ferrant et sera le premier maire de la commune en 1790. Jean Bordron
(1748-1813) et son fils, aussi appelé Jean Bordron (1771-1850), se rangèrent du
côté des révolutionnaires, le fils s’enrichissant en biens nationaux.
Le quatrième enfant est Clément
Grolleau (1761-1837) qui épousa à Saint-Fulgent Jeanne Badreau, fille d’un
meunier de la Basse-Clavelière le 23 janvier 1785 (vue 32 sur le registre
paroissial numérisé). Comme Jean Bordron ci-dessus, il se rangea dans le camp des
révolutionnaires, ainsi qu'on le voit dans sa participation au coup de force
électoral de mars 1799 à Saint-Fulgent (43). Sa descendance y poursuivi les activités des moulins de
la Clavelière jusqu’à leur terme, ainsi que les deux moulins de la Bourolière. Son
fils s’appelait Jacques Grolleau, comme son cousin de la Boutinière.
Le cinquième enfant,
Jeanne Grolleau, épousa Jean Aulneau, farinier demeurant au bourg de Sainte-Cécile
(44). On est frappé par ces mariages dans le milieu
des meuniers de préférence, quitte à aller dans les paroisses voisines chercher
son conjoint. Le choix des parents y semble plus prépondérant que le hasard
des coups de foudre amoureux.
Devenu veuf, André
Grolleau se remaria en février 1792 à Saint-André (vue 19) avec sa jeune
voisine, Jeanne Girard. Ils eurent Jacques
François né le 4 octobre 1792 (vue 27), puis Clément (1798-1798), André (1799), et
Louise Marie (1802-1862).
Pendant la guerre de Vendée les
bâtiments de la métairie d’Agnan Fortin dans le village furent incendiés :
maison, chambre haute et basse, grange, toit à bœufs, et fournil (45). En 1794, la maison de Clément
Grolleau fut aussi incendiée, ainsi que celle d’un de ses fils. La première a
été estimée à 120 F avant l’incendie et la deuxième 300 F. Des travaux de
reconstruction ont été réalisés en 1799 et 1800. Mais malgré cela, ces deux
maisons avaient perdu en janvier 1810, 50 % de leur valeur d’avant l’incendie (46).
Enfin dans les déclarations ou reconnaissance de droits on découvre deux annexes au tènement de la Boutinière : le tènement des Suries et le pré de Coudrette. Ils méritent un développement particulier.
Le tènement des Suries
Le tènement des Suries se trouvait compris entre le chemin de Saint-Fulgent à Sainte-Florence au nord, la métairie du Coudray au sud, et entre les
tènements de la Boutinière et de la Chevaleraye. La mouvance de ce tènement est
incertaine dans les déclarations roturières. Certains documents disent les
Bouchauds, d’autres le Coin Foucaud, les plus nombreux Languiller. Cela montre
le flou régnant dans les esprits et les archives à cette époque, déjà très
éloignée de celle des concessions seigneuriales de l’origine. Au vu d’un aveu
du Coin Foucaud de 1605, les Suries dépendaient de cette seigneurie. Néanmoins
le tènement était associé au tènement de la Boutinière. Dans un document daté
vers 1693, il est écrit : « le
village de la Boutinière et Suries » pour localiser une maison d’une
borderie : « un autre contrat
du 15 mai 1666 reçu sous la cour de Beaurepaire par Breau qui a les registres
et Levin, y notaires, par lequel Pierre Bouffard vend au sieur du Coudray le
tiers d’une maison et borderie size au village de la Boutinière et Suries pour
le prix et somme de 120 livres. » (47).
Les teneurs dans les Suries sont des habitants de la
Javelière, la Boutinière la Chevaleraye et la Brossière en 1626 (48). Dans les années 1685 on dénombrait
sept propriétaires aux Suries, qui devaient ensemble une rente annuelle de 8
boisseaux de seigle (1,4 quintal) au seigneur de Saint-Fulgent, et une autre rente
à Pierre Moreau sieur du Coudray de 20 boisseaux de seigle, les deux à la
mesure des Essarts. Ce sont Jacques et René Moreau
qui l’avaient achetée ensemble par échange le 5 décembre 1631 avec René Rabreuil
(49). Ce dernier
l’avait acquise d’Aymon, seigneur de la Pitière (Chauché). Jacques et René Moreau étaient frères, et dans leur succession cette rente échue dans
l’héritage du fils de Jacques, Pierre Moreau. En 1606 la rente de 20 boisseaux
était payée en trois parts égales par les propriétaires de la Chevaleraye,
Boutinière et Ridolière. Cette rente
faisait toujours partie du patrimoine de Claude Moreau, fils de Pierre, en
1727, lors de l’établissement par les syndics de ses créanciers d’une sentence
d’ordre de ses dettes (50).
Cette rente de 20 boisseaux était
possédée en 1806 par Pierre René Thibault La Pinière demeurant à Nantes place
de la Concorde. Né en 1737 il est décédé le 5 septembre 1806. Trois semaines
avant sa mort, six débiteurs lui ont racheté leur part dans la rente, soit une
partie d’entre eux. Il avait donné une procuration l’année d’avant à
l’instituteur de Saint-Fulgent, Jean Baptiste Bontemps, pour accepter le rachat
en son nom (51). Son fils Joseph (1774-1835) (avec une nombreuse descendance)
et sa fille Rose (1775-1857) se partagèrent sa succession.
Les huit personnes propriétaires
aux Suries en 1685 étaient :
-
Françoise Papin, veuve de Pierre Robin,
demeurant à la Girarderie de Vendrennes,
-
André Rondeau, laboureur demeurant à la
Ridolière de Saint-André,
-
Pierre Brisseau et son neveu Laurent Brisseau,
laboureurs demeurant à la Ridolière,
-
René Chacun, laboureur demeurant à la Ridolière
de Saint-André,
-
André Roger, laboureur demeurant à la Milonnière
de Saint-André,
-
Valérien Robin, maître tanneur
-
Marie Brisseau, épouse de Nicolas Mandin,
laboureur à Saint-André.
On ne sera pas étonné de la
concentration des habitants de la Ridolière pour posséder des terres aux
Suries. On sait que ce tènement de la Ridolière était tout petit, faisant
partie du fief de la Machicolière, et comprenant surtout le village et ses
jardins (Voir l’article publié sur ce site en août 2015 : La Machicolière dont le seigneur fut un prince.
Vers 1675, Pierre Moreau avait
fait une déclaration au seigneur de Languiller pour différentes parcelles
totalisant près de vingt boisselées de terres, prés et vignes, possédées au
tènement des Suries (52).
Le pré de Coudrette
La Boutinière
|
Une pièce de terre située entre
les tènements de la Bergeonnière et de la Boutinière, le long du Vendrenneau,
faisait l’objet d’un statut spécial. Appelée le « pré de Coudrette »,
autrefois le « pré de la Motte »,
elle avait été donnée dès avant 1550 au curé de Saint-Fulgent en « franche aumône » par le
seigneur du Coin Foucaud. C’était un don dont le bénéficiaire touchait les
revenus en pleine propriété, mais la terre concédée conservait le lien féodal
avec le seigneur donataire, symbolisé par le cens, modeste, de 4 deniers annuels
au terme de Saint-Jean-Baptiste. Ce lien entraînait l’obligation d’une
reconnaissance régulière par le curé de Saint-Fulgent au Coin Foucaud, suivant le
même régime qu’à Fondion pour la chapelle et la métairie. Cela n’a pas empêché l’indication
erronée en 1779, dans un partage de la succession du seigneur de la
Rabatelière, que le pré de Coudrette était mouvant des Bouchauds (53). Il est
vrai qu’à cette date cette confusion était sans conséquence car la Rabatelière
possédait à la fois les seigneuries de Languiller, des Bouchauds et du Coin
Foucaud.
Au gré des registres des Assises
de Languiller, on apprend que le curé de Saint-Fulgent s’appelait Jacques Coupé
à la fin du 16e siècle (54), Jacques Girardeau vers 1600 (55), Denis
Suandeau en 1611 et 1612 (56), et Jacques Girard en 1619 (57).
En 1654 c’est Pierre Boudaud qui
fait sa déclaration, rédigée par les deux notaires de Saint-Fulgent :
Thoumazeau et Benoist (58). On a pu repérer sa signature dans des actes de
baptêmes du registre paroissial de Saint-Fulgent entre 1640 et 1671, à côté des
vicaires qui se sont succédés auprès de lui pendant cette période.
En 1703 la déclaration est faite
par Alexis Morineau (59), curé de Saint-Fulgent de 1689 à 1704 (Voir le dictionnaire des Vendéens sur le site
internet des Archives de la Vendée). Il est décédé à Aizenay en 1721, où il
était curé.
Le pré de la Coudrette, située en
partie le long du ruisseau du Vendrenneau, y touchait le lieu-dit le « gué de Coudrette ». Il faisait
partie de la mouvance du Coin Foucaud, mais le seigneur de Saint-Fulgent l’a un
temps considéré comme annexe du tènement de la Boutinière, relevant de la
seigneurie des Bouchauds. Le pré a lui aussi été prétexte à la querelle entre
les seigneurs de Languiller et de Saint-Fulgent sur le droit de fief, au point que
son histoire le rattache de fait à la Boutinière. Nous reviendrons bientôt sur
cette longue et intéressante querelle.
(1) Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière :
150 J/G 58, déclaration roturière du 8-4-1671 de 4 teneurs à Saint-Fulgent pour la Boutinière,
à cause de la Chevaleraye (sic).
(2) Annuaire de la société d’émulation de la Vendée, Léon
Brochet, Les voies romaines en Bas-Poitou, 1907, page 147 vue 79/136.
(3) Déclaration roturière du 7-6-1595 de Maurice Rabereul pour un moulin
à vent de la Boutinière, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière :
150 J/G 58. Et note no 13 sur la Boutinière de Saint-André-Goule-d’Oie, Archives d’Amblard
de Guerry : S A-1.
(4) Archives historiques du
diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 19, famille Arnaudeau.
(5) Archives de Vendée, chartrier
de la Rabatelière : 150 J/G 40, Boutinière Chevaleraye Javelière procès
sur la mouvance, avertissement du 27-2-1736 de la baronne des Essarts dans le
procès entre les seigneurs de Saint-Fulgent et de Languiller.
(6) Archives de Vendée, archives de la Barette : 2 MI 36-4, déclaration en 1718 de Charlotte de la Douespe à la Barette pour sa métairie de Puy Mest.
(6) Archives de Vendée, archives de la Barette : 2 MI 36-4, déclaration en 1718 de Charlotte de la Douespe à la Barette pour sa métairie de Puy Mest.
(7) Arbre généalogique de la descendance de Thomas
de La Douespe.
(8) Archives de Vendée, notaires
de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/12, vente du 11-11-1789 des métairies de la
Boutinière et de la Chevaleraye par P. Bruneau à A. Fortin.
(9) Notaires de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/6, ferme de la Boutinière
de Jean Abraham Tinguy à Audureau du 7-9-1766.
(10) Notaires de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/6, ferme de la
Boutinière de Jean Abraham Tinguy à Roy du 7-6-1771.
(11) Archives du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé boisson : 7 Z 76-1, Saint-André-Goule-d’Oie, lieux-dits et autres.
(11) Archives du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé boisson : 7 Z 76-1, Saint-André-Goule-d’Oie, lieux-dits et autres.
(12) Sous ferme du 29 thermidor
an V d’Agnan Fortin, Archives de Vendée, minutier ancien des notaires des
Essarts, étude (A), Joseph David, 3 E 15 94-1, vues 89 et 90/114.
(13) Ferme du 22-9-1806 de la
métairie de la Boutinière, Archives de Vendée, notaires de
Chavagnes-en-Paillers, Bouron : 3 E 31/22.
(14) 150 J/G 58, déclaration
roturière du 30-6-1664 de Pierre Moreau et Nicolas Cougnon à Languiller pour la
Boutinière à cause des Bouchauds.
(15) 150 J/G 58, déclaration
roturière du 12-1-1685 d’André Roger à Languiller pour les Suries.
(16) Archives de Vendée, bibliothèque
numérisée, presse d’information générale numérisée par d’autres institutions
(18e siècle) : Affiches du Poitou, Archives de la Vienne : 1-4-1773
vue 2.
(17) 150 J/G 40, donation de 1560
de J. de Belleville et aveu de Saint-Fulgent en 1618 à Languiller pour les biens
donnés.
(18) Note no 10 sur la Boutinière
à Saint-André-Goule-d’Oie, Archives d’Amblard de Guerry : S-A 1.
(19) 150 J/E 1, assise de la
Rabatelière, Mancellière, Roche de Chauché et autres fiefs du 19-8-1632.
(20) Théophile de Tinguy, La Maison de Tinguy, Oudin à Poitiers,
1896, branche de la Sauvagère et de la Giroulière. Voir : www.tinguy.fr
source Gallica-BNF (page 85, vue 105).
(21) Archives de Vendée, G. de
Raignac, Quelques familles du Bas-Poitou,
tome 5 terminé le 30 mai 1986 : 8 J 5, famille de Rezay, page 132 et
s.
(22) Frédéric Godefroi, dictionnaire de l’ancienne langue française
et de tous ses dialectes du 9e au 15e siècle,
Librairie des sciences et des arts, 1938, tome 7.
(23) 150 J/G 11, déclaration
roturière du 12-6-1764 de Meterau et Reveleau pour domaines au Pin
(24) 150 J/G 58, déclaration
roturière du 1-6-1606 de 7 teneurs à la Boutinière, Chevaleraye, Suries et
Bruères.
(25)
Inventaire après-décès en 1666 du mobilier, vaisselle, linge et papiers de
Pierre Moreau, Archives de Vendée, chartrier de Roche-Guillaume, famille Moreau
: 22 J 29, page 65.
(26) Archives de Vendée, chartrier de Roche-Guillaume, famille
Moreau : 22 J 29, déclarations roturières diverses de Pierre Moreau vers
1675.
(27) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de
l’abbé boisson : 7 Z 73-9 logis et moulins de Saint-André-Goule-d’Oie, visite
à la Boutarlière du 8 août 1977.
(28) 150 J/G 58, déclaration
roturière du 7-6-1595 de Maurice Rabereul à Languiller à cause des Bouchauds, pour
un moulin à vent de la Boutinière.
(29) E. Durel, Les moulins de Vendée, Geste Éditions,
2016, page 22.
(30) 150 J/G 58, déclaration
roturière du 2-7-1614 de trois teneurs à Saint-Fulgent à cause des fiefs de la
Chevaleraye et Boutinière (sic) pour un moulin à vent de la Boutinière.
(31) 150 J/G 58, déclaration
roturière du 21-5-1624 de Marguerite Leray à Saint-Fulgent à cause des fiefs de la
Chevaleraye, Javelière et Boutinière (sic) pour un moulin à vent de la
Boutinière.
(32) Inventaire après décès de 1666 du
mobilier, vaisselle, linge et papiers de Pierre Moreau, page 75, Archives de
Vendée, chartrier de Roche-Guillaume, famille Moreau : 22 J 29.
(33) 150 J/G 58, déclaration roturière du 11-3-1671 de Louis Payneau à Saint-Fulgent pour un moulin à vent de la Boutinière.
(33) 150 J/G 58, déclaration roturière du 11-3-1671 de Louis Payneau à Saint-Fulgent pour un moulin à vent de la Boutinière.
(34) 150 J/G 58, déclaration
roturière du 29-3-1698 de Catherine Payneau à [blanc] pour un moulin à vent de
la Boutinière.
(35) 22 J 29, sentence d’ordre du
9-9-1727 des syndics des créanciers de Moreau et Menard.
(36) E. Durel, Les moulins de Vendée, Geste Éditions,
2016, page 10.
(37) Augustin Herault, Les « gas » du bocage vendéen de 1760 à 1960, Hérault, Maulévrier, (1977), pages 30 et 246.
(37) Augustin Herault, Les « gas » du bocage vendéen de 1760 à 1960, Hérault, Maulévrier, (1977), pages 30 et 246.
(38) Archives de Vendée, Chartrier de Roche-Guillaume, famille
Moreau : 22 J 29, déclarations roturières diverses de Pierre Moreau vers
1675.
(39) Communauté nouvelle du 25-2-1765 entre les Groleau de la
Boutinière, Archives de Vendée, notaires de Saint-Fulgent, Thoumazeau : 3
E 30/118.
(40) Testament 20-2-1765 de
Clément Grolleau, Archives de Vendée, notaires de Saint-Fulgent,
Thoumazeau : 3 E 30/118.
(41) Achat du 18-4-1768 du ¼ du
petit moulin à vent de la Boutinière, Archives de Vendée, notaires de
Saint-Fulgent, Thoumazeau : 3 E 30/120.
(42) Transaction du 16-12-1783 entre de Tinguy et André Grolleau à propos de la construction d’une grange à la Boutinière, Archives de Vendée, notaires de St Fulgent, Frappier : 3 E 30/10.
(42) Transaction du 16-12-1783 entre de Tinguy et André Grolleau à propos de la construction d’une grange à la Boutinière, Archives de Vendée, notaires de St Fulgent, Frappier : 3 E 30/10.
(43) P.V. d’assemblée électorale
du 22 ventôse an VII à Saint-Fulgent, Archives historiques du diocèse de Luçon,
fonds Boisson, 7 Z 12-III.
(44) Amortissement du 26-6-1792
de la rente de 14 livres par André Bonnin à Grolleau et consorts sur des
domaines de la Porcelière, Archives de la Vendée, notaires de Saint-Fulgent, Frappier :
3 E 30/13
(45) Archives historiques du
diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 10-4, partage de la
succession des enfants Fortin avec la République subrogée dans les droits du
fils aîné émigré.
(46) Archives de la Vendée,
destructions immobilières pendant la guerre de Vendée : 1 M 392, commune de
Saint-André-Goule-d'Oie.
(47) 22 J 29, mémoire pour le
seigneur de Languiller en réponse à Moreau sur ses propriétés vers 1693.(48)
Assises de Languiller et fiefs annexes en 1626, Archives de Vendée, chartrier
de la Rabatelière : 150 J/M 30, page 6.
(49) Inventaire
après-décès en 1666 du mobilier, vaisselle, linge et papiers de Pierre Moreau,
Archives de Vendée, chartrier de Roche-Guillaume, famille Moreau : 22 J 29,
page 121.
(50) Idem (35).
(51) Amortissement en 1806 d’une
rente aux Suries, Archives de Vendée, notaires de Chavagnes-en-Paillers,
Bouron : 3 E 31/22.
(52) Idem (25).
(53) Partage du 18-10-1779 de la
succession de René de Montaudouin seigneur de la Rabatelière, page 34, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/C 68.
(54) Assises de Languiller à la fin du 16e siècle, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/M 34, page 49.
(55) Ibidem : 150J /M 33, page 182.
(56) Ibidem : 150J /M 32, page 45 et 150J/M 29, page 47.
(57) Ibidem : 150J /M 34, page 50.
(58) 150 J/G 18, déclaration roturière du curé de Saint-Fulgent à Languiller pour le pré de la Motte du 11-4-1654.
(54) Assises de Languiller à la fin du 16e siècle, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/M 34, page 49.
(55) Ibidem : 150J /M 33, page 182.
(56) Ibidem : 150J /M 32, page 45 et 150J/M 29, page 47.
(57) Ibidem : 150J /M 34, page 50.
(58) 150 J/G 18, déclaration roturière du curé de Saint-Fulgent à Languiller pour le pré de la Motte du 11-4-1654.
(59) 150 J/G 18, déclaration
roturière du curé de Saint-Fulgent à Languiller pour le pré de la Motte du
30-9-1703.
Emmanuel François, tous droits réservés